Maroc : Inwi ne veut pas perdre le fil
L’opérateur voit sa rentabilité s’éroder. Pour résister, il mise sur l’internet. Sa stratégie : appliquer à ce marché les recettes qui lui ont réussi dans le mobile.
« Au Maroc, le prix de la minute de communication est extrêmement bas. Le secteur des télécoms doit retrouver davantage de marge. » De la part d’un opérateur, le discours est attendu. Mais il l’est un peu moins dans la bouche de Frédéric Debord, directeur général d’Inwi. Depuis le lancement de la marque en 2010 (en remplacement de Wana), la filiale du holding royal SNI a fait de la démocratisation du mobile un leitmotiv. Avec un certain succès. En lançant des services innovants comme la facturation à la seconde, son patron assure avoir contribué à faire baisser les prix de 75 % entre 2009 et 2013. Dans le même temps, l’utilisation du portable s’est accrue de 400 % ; elle atteint en moyenne 83 minutes par mois et par usager, d’après l’Agence nationale de réglementation des télécommunications (ANRT, le régulateur).
Confidentielles
Mais après une année 2013 qui a encore vu chuter de 23 % le prix par minute des communications depuis un mobile (0,41 dirham hors taxes, soit 0,04 euro), Inwi marque le pas. Son chiffre d’affaires a chuté de 100 millions de dirhams par rapport à 2012, pour s’établir à 6,2 milliards de dirhams. Et, si son état-major garde les données confidentielles, il reconnaît une baisse sensible de la rentabilité. Autre mauvaise nouvelle pour l’opérateur, en lutte avec Méditélécom : ce dernier (détenu à 40 % par le français Orange) a retrouvé quelques couleurs au quatrième trimestre 2013. Résultat, avec 11,9 millions de clients et une part de marché du mobile de 28 %, Inwi reste en troisième position derrière Maroc Télécom (42,8 %) et Méditélécom (29,2 %).
En 2014, Inwi (1 200 salariés) fera à nouveau de la relation avec ses clients un axe fort de son marketing. Depuis le 24 mars, il offre à ses abonnés un son en haute définition permettant de converser plus facilement dans les environnements bruyants. Mais pour retrouver une dynamique, son directeur général compte avant tout sur internet. Cette stratégie a le soutien de SNI, l’actionnaire principal, qui, malgré les appels du pied d’un consortium koweïtien associant l’opérateur Zain et le fonds Al Ajial, entend garder les rênes.
Actuellement, les échanges de données ne représentent qu’un peu plus de 7 % des revenus d’Inwi, un niveau dans la moyenne marocaine, mais bien inférieur à celui observé sur un marché mature comme celui de la France (30 %). D’après l’ANRT, l’opérateur détient 9,8 % du marché de l’internet grâce à la vente de clés 3G (modems haut débit). Toutefois, sa part de marché devrait rapidement progresser. Le 18 mars, Inwi a lancé une offre 3G+ sur les mobiles à Casablanca et à Rabat. Elle devrait être étendue à l’ensemble du réseau dans le courant de l’année.
« Triple play »
L’entreprise mise aussi sur la commercialisation d’une connexion fixe ADSL. Mais son lancement est pour l’heure suspendu : Inwi ne parvient pas à accéder aux infrastructures filaires de l’opérateur historique, Maroc Télécom, alors que la loi l’y autorise. « Nous avons saisi le régulateur, explique Frédéric Debord. C’est d’autant plus regrettable que nous sentons une forte demande pour des offres double et triple play [regroupant téléphone et internet ou téléphone, internet et télévision]. On le voit dans tous les pays : l’internet a explosé quand l’ADSL a été libéralisé. »
En attendant, c’est dans les services aux entreprises que l’opérateur réalise les performances les plus satisfaisantes. « Nous connaissons une croissance à deux chiffres dans ce secteur », annonce Frédéric Debord sans plus de précision.
Héritier du fournisseur d’accès à l’internet Maroc Connect, Inwi possède, chose rare en dehors des opérateurs historiques, ses propres réseaux de fibre optique. « Nous voulons démocratiser l’internet comme nous l’avons fait avec la voix, affirme le directeur général. En 2013, nous avons investi 1,5 milliard de dirhams ; cette année, nous atteindrons 3 milliards et, sur les cinq prochaines années, 10 milliards. » L’entreprise entend notamment construire son propre câble sous-marin pour relier Casablanca à l’Europe.
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