Le roman noir voit la vie en rose

Publié le 12 septembre 2005 Lecture : 2 minutes.

Vingt millions d’exemplaires vendus l’an dernier en France : un livre sur cinq, plus d’un roman sur trois. Le « polar » a le vent en poupe. Il y a trente ans, ce genre que les critiques tenaient dans le plus grand mépris n’avait droit qu’à quelques lignes dans les magazines littéraires. Lire des bouquins du Fleuve noir, du Masque ou de la Série noire ne faisait pas sérieux. Aujourd’hui, quelque soixante éditeurs totalisant près de quatre-vingts collections se partagent le gâteau. Certains comme Rivages, Le Seuil ou Albin Michel lui doivent une bonne part de leur trésorerie. Et les « vrais » écrivains tels Umberto Eco ou Franz-Olivier Giesbert n’hésitent plus à se mettre au policier.
Certes, les Anglo-Saxons tiennent toujours le haut du pavé. Mary Higgins Clark, Patricia Cornwell, John Grisham, James Ellroy continuent à aligner les best-sellers. Ils ont été rejoints par Harlan Coben, Michael Connelly, Dennis Lehane, Elizabeth George mais aussi Dan Brown, dont les deux thrillers historico-esotériques, Da Vinci Code (plus de 1,7 million d’exemplaires vendus en France) et Anges et démons (près de 600 000), caracolent depuis de longs mois en tête des box-offices du monde entier.
Mais le polar s’internationalise, avec l’apparition sur le marché francophone d’auteurs russes, cubains, espagnols, italiens, sud-africains et, surtout, nord-européens. Parmi les révélations de ces dernières années, les Suédois Henning Mankell (traduit au Seuil) et Ake Edwardson (Lattès), l’Islandais Arnaldur Indridason (Métailié).
Les Français ne sont pas en reste. Au début des années 1970, le polar local se nourrissait encore d’histoires de truands à Pigalle lorsque Jean-Patrick Manchette (mort en 1995) vint ancrer la littérature noire dans une virulente critique sociale. Il ouvrit la voie à toute une génération d’auteurs talentueux (Jean Vautrin, Didier Daeninckx, Thierry Jonquet, Marc Villard, Tonino Benacquista…), soucieux eux aussi d’aborder les réalités sociales contemporaines. Deux nouvelles figures ont émergé récemment, battant tous les records de vente. Les livres de Jean-Christophe Grangé, adepte du thriller à l’américaine, et Fred Vargas, dont l’architecture romanesque est plus complexe, dépassent régulièrement les 200 000 exemplaires.
On peut ne pas aimer les histoires de flics et d’assassins. Mais la multiplication des traductions et la diversification des thématiques permettent au lecteur de découvrir de nouveaux univers et de toucher du doigt les questions essentielles du monde contemporain. Car le polar met en scène pour l’essentiel des marginaux, des rebelles. Peut-on imaginer meilleurs révélateurs de l’état d’une société que ceux qui en remettent en question les règles fondamentales ?

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