Touche pas à la langue du Coran !

Publié le 12 juillet 2004 Lecture : 2 minutes.

Les Égyptiens sont familiers des « affaires » politico-religieuses mettant aux prises intellectuels et autorités de l’islam. On se souvient de l’anathème qui avait frappé en 1995 l’universitaire Nasr Hamed Abou Zeid, accusé d’apostasie pour avoir avancé (après d’autres chercheurs, au demeurant) que le Coran n’a pas été révélé d’une traite, mais par fragments, pendant près d’un quart de siècle.
Une vive polémique oppose aujourd’hui un journaliste et un député. Cherif Choubachi, professionnel très connu, notamment en France où il a été pendant vingt ans le correspondant du quotidien Al-Ahram,vient de faire paraître un livre intitulé Vive la langue arabe ! À bas Sibawayh ! Hamdi Hassan, un élu islamiste, en a demandé l’interdiction au ministre de la Culture Farouk Hosni.

Pour Choubachi, l’arabe est inadapté au monde contemporain. « Les Arabes vivent dans un état de schizophrénie permanent, commente-t-il. Ils parlent dans leur vie courante une langue tandis qu’ils écrivent et étudient dans une autre. » L’arabe est en effet probablement la seule langue au monde dont la grammaire est figée depuis aussi longtemps : rien n’y a été changé depuis que le fameux Sibawayh en a jeté les bases au VIIIe siècle. Par exemple, elle utilise encore, à côté du singulier et du pluriel, ce qu’on appelle le duel, c’est-à-dire qu’elle prévoit des termes spécifiques quand il s’agit de deux personnes.
Pour Farouk Hosni, prôner la modernisation de la langue arabe c’est faire le jeu des « occupants et des envahisseurs ». Mais, surtout, on n’a pas le droit d’y toucher, car c’est la langue du Coran.
Choubachi rétorque qu’entre les Iraniens, les Turcs, les Indiens, les Indonésiens, les Africains subsahariens et autres, plus de 80 % des musulmans ne connaissent pas l’arabe. On ne peut donc confondre la religion et la langue dans laquelle elle a été révélée.

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Quoi qu’il en soit, il n’est pas sûr que la demande d’interdiction aboutisse. L’auteur du livre ne manque pas de soutien en haut lieu. Président du festival de cinéma du Caire, il occupe les fonctions de sous-secrétaire d’État à la Culture. Son ouvrage, par ailleurs, est édité par l’Autorité générale du livre égyptien, un organisme tout ce qu’il y a de plus officiel.

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