Objectif sucre

L’OMS préconise une alimentation moins riche. Mais le lobby américain résiste. Et tente de gagner les pays en développement à sa cause…

Publié le 12 juillet 2004 Lecture : 2 minutes.

La guerre entre l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et l’association des producteurs américains de sucre ne faiblit pas. Objet de la discorde : la « stratégie mondiale pour l’alimentation, l’exercice physique et la santé », élaborée par l’agence onusienne et destinée à diminuer la charge morbide des maladies cardio-vasculaires, du diabète, du cancer et des affections liées à l’obésité (soit 47 % des maladies dans le monde).
Dans cette étude, les experts recommandent une diminution drastique de la consommation de graisses saturées, d’acides gras, de sel et de sucre, au profit d’un plus grand apport en fruits et en légumes pour que les personnes en surpoids (au total un milliard dans le monde) ne deviennent pas obèses, comme le sont déjà 300 millions d’entre elles. D’où l’ire des sucriers américains, qui, constitués en un lobby très puissant, se sont mis en tête d’empêcher la mise en oeuvre de cette stratégie.
Déjà en 2003, ces industriels, qui se soucient peu de savoir que, dans leur propre pays, près de la moitié des adolescents souffrent d’une surcharge pondérale, avaient fait pression sur le Congrès pour que toutes les subventions destinées à l’OMS soient coupées. À l’époque, le texte onusien n’en était qu’au stade de l’élaboration. Mais en mai 2004, à Genève, lors de la cinquante-septième assemblée générale de l’OMS, c’est de l’application concrète de cette stratégie qu’il a été question. D’où la nouvelle offensive des sucriers américains.
Ces derniers ont adopté une nouvelle tactique, en tentant de rallier à leur cause les pays en développement producteurs de sucre. Une manoeuvre habile puisque, pour qu’une décision soit prise à l’assemblée générale de l’OMS, l’unanimité des 192 États membres est requise. D’amicales pressions ont donc été exercées sur des pays comme Maurice ou le Guyana afin qu’ils s’engagent contre ce texte, pourtant qualifié « d’important pas en avant » par le Grocery Manufacturers of America.
Pour les petits pays producteurs, le danger était surtout d’ordre commercial. Ils redoutaient que les nouvelles orientations de l’OMS entraînent une diminution des quotas d’importation définis dans le cadre de l’Organisation mondiale du commerce (OMC). C’est le Brésil, principal producteur de sucre de canne et traditionnellement en pointe en matière de santé publique, qui a proposé la tenue d’une réunion à huis clos pour surmonter les obstacles. De nombreux amendements ont été apportés, notamment en matière de règles commerciales. Mais l’affirmation selon laquelle « les niveaux appropriés d’apport en énergie, en nutriments et en aliments » seront déterminés « conformément aux lignes directrices nationales » équivaut, pour les sucriers américains, à une victoire, au moins sur leur territoire. Ils auront désormais tout loisir d’exercer de nouvelles pressions sur les gouvernements des pays en développement pour influer sur leurs législations nationales…

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