Jean-Charles Okoto
Ancien président de la Société minière de Bakwanga (Miba)
J’ai lu avec stupeur l’article intitulé « Liaisons dangereuses pour la Belgolaise » paru dans le numéro 2266 de votre journal. Ma surprise a été grande de découvrir une charge excessive et injustifiée à mon encontre. J’ai été traité de voleur, de trafiquant d’armes, de kidnappeur dans ce brûlot qui regorge de contre-vérités.
L’article dit que je n’étais pas encore trentenaire en août 1998. Inexact. J’ai aujourd’hui la cinquantaine. L’article dit que je suis devenu l’an dernier secrétaire général du Parti du peuple pour la reconstruction et le développement (PPRD). Inexact. J’en suis le secrétaire chargé de l’organisation et de la mobilisation. L’article dit que je suis apparu dans mon pays « dans le sillage de Laurent-Désiré Kabila », en 1997. Inexact. J’ai exercé, antérieurement à cette date, des fonctions de premier plan : cadre à la Société nationale des assurances (Sonas), commissaire de Zone assistant, commissaire de Zone titulaire, commissaire sous-régional, conseiller principal du Premier ministre Birindwa chargé de l’Administration et des Affaires coutumières. L’article indique qu’un mandat d’arrêt international a été lancé contre moi en Belgique. Inexact. Ni mes avocats ni moi-même n’avons reçu la moindre signification d’un tel acte.
Plus grave, cette charge démesurée truffée d’erreurs factuelles suggère que j’ai détourné 80 millions de dollars, dont 20 millions ont servi à l’achat d’armes en Tchéquie et en Ukraine pour le régime de feu Laurent-Désiré Kabila. À ce niveau, je pourrais opposer à votre journal la réaction de la Belgolaise, qui me dédouane entièrement en assurant ne pas encaisser de l’argent dont elle ignore la provenance. Mais cela ne me suffit pas. Les chiffres montrent qu’il est absolument impossible de détourner 80 millions de dollars de la Miba, pour la bonne raison que cette société ne peut pas amasser des recettes de ce montant. La Miba produit annuellement 6 millions de dollars, dont 70 % destinés au paiement de la dette de l’entreprise, 20 % consacrés aux salaires du personnel, et les 10 % restants aux acomptes fiscaux. Comment peut-on détourner, en deux ans de fonction, 80 millions de dollars d’une entreprise qui ne fait même pas 100 000 dollars de bénéfice annuel ? L’auteur de l’article connaît-il l’argent ? A-t-il un sens des chiffres ? La Belgolaise peut le confirmer, la Miba court depuis plus de cinq ans derrière un prêt de 1,5 million de dollars qu’elle n’a jusqu’à ce jour pas obtenu. Comment un journal comme le vôtre peut-il avancer le chiffre fantasmatique de 80 millions de dollars, qui ne peut que faire rire les spécialistes du secteur du diamant et des milieux bancaires ?
Je n’ai jamais acheté d’armes dans ma vie. Je n’ai pas une seule fois mis les pieds en Tchéquie ni en Ukraine. Votre journal ne peut prouver aucune de ces allégations.
L’article va plus loin en m’accusant d’avoir commandité l’enlèvement « d’un cadre de la Miba à Bruxelles » et une tentative d’enlèvement du vicomte Etienne Davignon. Le cadre en question, Kandala Tshiyaza, était licencié quand j’arrivais à la tête de la Miba, je l’ai réintégré à son poste eu égard à sa compétence. Preuve que je n’éprouve aucune forme d’inimitié pour lui, ni la moindre volonté de lui nuire.
Je trouve léger et inconscient de proférer des accusations aussi graves qu’une tentative d’enlèvement d’un juge. Comment peut-on écrire des choses aussi graves dans un journal comme le vôtre ? […]
Dans l’intérêt de la vérité, je ne peux pas ne pas signaler quelques faits avérés, vérifiables hic et nunc. À la tête de la Miba, j’ai accru la production de 300 000 à 700 000 carats en l’espace de deux ans, éradiqué le vol des pierres par un système de sécurité sans faille, mis fin à la vente artisanale, et instauré l’écoulement de la totalité du diamant produit à la Bourse internationale. Ces faits auraient pu être tenus à la connaissance de votre journal, s’il s’était donné la peine d’interroger la Miba dans un souci d’équilibre de l’information. n
NDLR : Nous ne pouvons que plaider coupables pour les erreurs introduites dans votre biographie et nous en excuser auprès de vous. Ainsi que pour certaines formulations pouvant prêter à confusion contenues dans l’article que vous incriminez. Il n’en demeure pas moins que, joint par nos soins, le premier substitut du procureur du roi et porte-parole du parquet de Bruxelles, M. Jos Colpin, confirme qu’un mandat d’arrêt international a bien été lancé contre vous par le juge financier Michel Claise, en date du 2 juin 2004, sur la base d’un dossier ouvert à l’instruction le 28 janvier 2003. Le fait que vous n’ayez pas, dites-vous, reçu notification de ce mandat, ne signifie pas pour autant qu’il n’existe pas.
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