Africa is back ?

Publié le 12 juillet 2004 Lecture : 3 minutes.

Addis-Abeba, capitale de l’Éthiopie et, pour quelques jours, de l’Afrique. En y ouvrant le IIIe Sommet de l’Union africaine, ce mardi 6 juillet, le président de son exécutif, Alpha Oumar Konaré, a l’audace de claironner : Africa is back.
Annonce volontariste du retour du continent africain sur la scène internationale, de sa renaissance tant de fois annoncée ces dernières années et toujours différée.
Cette fois-ci est-elle la bonne ? Il faudrait pour cela que plusieurs conditions soient réunies, ce qui n’est actuellement pas le cas.

Un pays, ou un ensemble de pays, ne peut renaître, exister, compter s’il n’a pas entrepris de vaincre les grandes maladies qui frappent ses habitants (en l’occurrence le paludisme et le sida, qui sont les deux maux les plus meurtriers et les plus débilitants), de faire reculer la pauvreté et l’analphabétisme.
Il ne renaît pas mais, au contraire, se défait s’il est ravagé par des guerres civiles ou de voisinage, qui sèment la mort, chassent les populations de leurs terres, détruisent le fruit de leur labeur.
Il stagne, perd l’espoir lorsqu’il est mal gouverné et que la corruption dicte à ses dirigeants (ou à beaucoup d’entre eux) leurs décisions.
Il ne peut ni se développer ni même espérer réaliser le moindre progrès s’il est ligoté par un endettement excessif : il s’épuise à essayer de satisfaire les exigences de ses créanciers.

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« L’Afrique a longtemps été affligée de dirigeants inefficaces, voire nuisibles : prédateurs, pilleurs, autocrates parvenus au pouvoir à la faveur d’un coup d’État militaire, incompétents dans le domaine économique et bouffis d’orgueil.
« 90 % des États d’Afrique subsaharienne ont, ces trente dernières années, fait l’expérience d’un pouvoir despotique. Ces dirigeants se servent de leur pouvoir dans leur intérêt particulier plutôt que dans l’intérêt général ; ils se montrent indifférents au bien-être de leurs citoyens (bien qu’ils ne désirent rien tant que d’être adulés par eux). Ils perdent le sens de la mesure et n’hésitent pas à s’appuyer sur des idéologies pernicieuses, qu’elles soient porteuses d’inégalités sociales ou d’inégalités raciales. Enfin, ils se montrent hypocrites et n’assument jamais leur responsabilité dans les maux dont souffrent leurs pays.
« Sous le règne de ces despotes, les infrastructures sont devenues vétustes dans de nombreux pays. Leur monnaie a été dévaluée et l’inflation y a atteint des sommets, pendant que l’emploi, la santé ou l’éducation se détérioraient et que l’espérance de vie diminuait. Les conditions de vie se sont dégradées. L’insécurité a crû et, avec elle, le crime et la corruption. Des fonds publics indispensables au développement ont afflué en masse sur des comptes secrets et les discriminations raciales, parfois héritées de guerres civiles, se sont répandues… »
Tant qu’il nous sera donné de lire, sous des plumes de personnalités amies de l’Afrique, dans des publications respectées(*), une description aussi sévère des plaies actuelles du continent africain, nous ne pourrons dire, dans aucune langue : « Africa is back. »

Par quoi commencer ? Au point où ils en sont, les Africains n’ont plus le choix : ils doivent s’attaquer simultanément à tous leurs maux.
Pour entreprendre ce combat, il leur faut retrouver la volonté de se battre et se convaincre qu’ils ont une chance de réussir. C’est, je pense, le message qu’a voulu faire passer Alpha Oumar Konaré : si elle le veut suffisamment, si elle parvient à rassembler ce qui lui reste de forces et si les meilleurs de ses dirigeants font les bons choix, l’Afrique peut revenir sur le devant de la scène, se remettre au diapason des autres.

* Robert Rotberg, président de la World Peace Foundation (Fondation mondiale pour la paix), dans Foreign Affairs.

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