Maroc : pourquoi la Bourse de Casablanca s’inquiète pour 2021
Après avoir su contenir les pertes en 2020, le marché marocain s’attend à de nouvelles baisses dans les mois à venir. Explications.
Malgré la pandémie, la Bourse de Casablanca a réussi à contenir les dégâts en 2020, ne perdant que 7,2 % sur l’ensemble de l’exercice, soit moins qu’en 2015, grâce notamment à une bonne remontée des cours en fin d’année.
Celle-ci, entamée en novembre, s’est poursuivie jusqu’au début de février, avec une progression de 14 % sur les trois mois. Mais un fléchissement commence à se faire sentir (- 2 % depuis le début du mois de février), ce qui ne surprend pas Ranya Gnaba, analyste au sein du cabinet indépendant Alpha Mena. « La hausse de la fin d’année était, selon nous, exagérée, et donc la correction observée était inévitable », explique-t-elle à Jeune Afrique.
Cette tendance baissière fait trembler les investisseurs qui craignent que 2021 soit la vraie année de crise soit. Ainsi, les prises de bénéfices – qui consiste à vendre une participation d’une valeur qui a connu une récente hausse pour s’assurer un minimum de gain – se multiplient sur le marché marocain.
Abdellatif Jouahri très attendu
« Les entreprises qui ont “sauvé le marché” l’année dernière sont celles qu’il faut surveiller en ce moment à cause du mouvement vendeur », prévient ainsi un analyste de la place marocaine. Depuis la mi-janvier, les trois valeurs qui ont drainé le plus de volumes sont Attijariwafa Bank, avec plus de 340 millions de dirhams (31 millions d’euros), IAM Gold, avec plus de 280 millions de dirhams, et Marsa Maroc, avec 170 millions de dirhams.
Les trois entreprises figurent aussi sur la longue liste des actions qui perdent de la valeur, aux côtés des Eaux minérales d’Oulmès (- 13,6 % depuis le 1er janvier) ou Lydec (- 11,5 % depuis le 1er janvier).
Selon plusieurs sources, le mouvement vendeur vient plus particulièrement des investisseurs étrangers et aussi de quelques gérants de portefeuille en quête de bonnes performances, les investisseurs institutionnels surveillent cela de loin en attendant de voir plus clair.
« Il faudrait un fait positif pour inverser la tendance baissière du Masi », glissent nos interlocuteurs qui parient sur la prochaine prise de parole de Abdellatif Jouahri, le gouverneur de la banque centrale, attendue le 23 mars. Le wali devrait y faire part de ses prévisions et de sa vision de la situation actuelle.
Les banques sous surveillance
Mais selon Ranya Gnaba, les investisseurs craignent que les dividendes se raréfient à la suite de la crise, notamment dans la banque où le dividende est le principal catalyseur de l’action. « Le dividende dans ce secteur a été globalement maintenu en 2020, malgré les recommandations de Bank Al-Maghrib qui préconisait de conserver les fonds propres », précise-t-elle.
Malgré une situation nationale encore relativement bonne, le secteur bancaire est donc scrupuleusement surveillé par les investisseurs, qui s’inquiètent notamment de l’activité subsaharienne de ses différents acteurs et s’attendent à une année 2021 marquée par la rareté des dividendes bancaires, ou du moins à des taux moins généreux.
D’autres observateurs craignent que la cote casablancaise ne soit fragilisée par la flopée de « profit-warning » attendus entre maintenant et la mi-mars et aussi par les résultats mitigés prévus, même si les annonces de dividendes sont, jusqu’à présent, rassurantes.
Contre-performances à prévoir
Pour le moment, la Bourse a publié cinq alertes relatives à l’exercice 2020 (Total Maroc, Afriquia Gaz, CTM, Involys et Maghreb Oxygène) mais ces dernières qui n’ont pas eu un gros impact sur le Masi. « Ces alertes étaient attendues, le marché avait déjà intégré dans le cours les mauvais résultats à venir », explique un analyste qui craint en revanche les annonces qui viendront de l’immobilier, des banques et du BTP.
« La contre-performance des grosses capitalisations devrait alimenter la baisse du Masi sur les prochains mois », estime Ranya Gnaba, d’AlphaMena, pour qui « les dégâts de 2020 ne seront pas marginaux et se ressentiront sur le bilan des sociétés ».
Le même constat a été établi il y a quelques semaines par les équipes de Bachir Tazi, patron de CFG Bank Capital Markets, qui anticipaient un recul de 18 % de la masse bénéficiaire des valeurs qui composent le CFG25 (les 25 actions les plus liquides et qui représentent presque 90 % de la capitalisation globale), notamment du fait des taux de provisionnement élevés en 2020 et du coût du risque.
Du côté de la banque d’affaires de BMCE Bank Of Africa, on estime que la baisse serait de presque 19 % pour le dernier exercice, si on englobe l’ensemble des valeurs. L’entité dirigée par Fadoua Housni a anticipé en fin d’année dernière des baisses aiguës pour des secteurs tels que l’industrie des matériaux de construction, l’immobilier ainsi que pour le secteur pétrolier.
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