Objectif diversification

L’extraction de l’or et la culture du coton demeurent les principales sources de revenus.

Publié le 12 juin 2006 Lecture : 4 minutes.

Situé au cur du Sahel, le Mali ne jouit pas d’une situation des plus favorables. Si la volonté et le travail des hommes sont les conditions indispensables du développement économique, « cette vulnérabilité géographique accentue le piège de la pauvreté », selon l’expression de Jeffrey Sachs, le conseiller du secrétaire général de l’ONU, Kofi Annan, en charge des Objectifs du millénaire. En ce qui concerne le Mali, les deux dernières années en apportent la démonstration. En 2004, sur fond de sécheresse et d’invasion de criquets, le taux de croissance a péniblement atteint 2,2 %, et les populations ont dû batailler contre la menace d’une crise alimentaire. En 2005, les pluies ont entraîné une hausse des rendements agricoles et la croissance a dépassé 5 %. Ces mouvements s’expliquent par « des facteurs exogènes, tels que la pluviosité, les fluctuations des cours des principaux produits d’exportation sur les marchés internationaux, la hausse des prix des hydrocarbures et l’instabilité régionale liée à la crise ivoirienne », estime le centre de développement de l’Organisation pour la coopération et le développement économiques (OCDE) dans son rapport « Perspectives économiques en Afrique ».
Le secteur primaire, qui occupe près de 70 % de la population active, représente seulement 34 % du PIB, mais de meilleures performances ont été obtenues l’année dernière. Essentiellement en raison d’un sursaut de la filière coton qui fait vivre 3,3 millions de personnes. La campagne 2004-2005 a été catastrophique. Elle s’est soldée par un déficit de 68 milliards de F CFA pour la Compagnie malienne pour le développement du textile (CMDT). Et pour 2005-2006, la récolte de coton-graine ne dépassera 535 000 tonnes, contre 589 000 tonnes un an plus tôt. Et ce malgré une baisse du prix d’achat au producteur, passé de 210 F CFA/kg à 160 F CFA. Si cette filière assure un complément de revenu aux paysans, elle est aussi facteur de dynamisme en favorisant l’utilisation d’engrais ou de produits phytosanitaires. Les récoltes de céréales (maïs, mil, sorgho) ont ainsi atteint 3 millions de tonnes (+ 20 %). Pour le riz, avec 900 000 tonnes, ce sont les plus importantes depuis trois ans. La sécurité alimentaire est assurée.
Profitant de cette conjoncture favorable, les autorités de Bamako ont lancé en octobre 2005 un Programme pour la compétitivité et la diversification agricoles (PDCA). Objectif : développer la transformation et la commercialisation de produits maraîchers (tomates, mangues, pommes de terre, haricots verts).
Si la terre est le plus souvent aride, le sous-sol possède quelques trésors. En dix ans, le Mali est devenu le troisième pays producteur d’or du continent, derrière l’Afrique du Sud et le Ghana. En 2005, la production est estimée à 52 tonnes (12 % du PIB et 69 % des revenus d’exportations). Le gouvernement table sur une croissance de 6 % en 2006, grâce à l’exploitation de la mine de Loulo dont les réserves sont évaluées à 42 tonnes. Dans les régions de Kayes et Sikasso, le potentiel de production est estimé à 600 tonnes. Afin d’attirer de nouveaux investisseurs sur d’autres gisements, les autorités étudient un nouveau code minier. En ligne de mire, outre le métal jaune, le phosphate, mais aussi, et surtout, les bassins sédimentaires potentiellement riches en hydrocarbures de Taoudenni, Gao, Iullemeden, Tamesna et Nara. Cinq blocs de recherche, dans le nord du pays, ont été acquis par l’australien Max de Vietri, le découvreur du pétrole mauritanien, via la société Baraka Mali Ventures (BMV).
Voilà pour les atouts naturels, encore faut-il avoir les moyens de les exploiter de manière rentable. Pour cela, deux défis sont à relever : l’énergie et les transports. D’ici à 2009, il est prévu d’atteindre un taux d’électrification de 10 % dans les zones rurales, grâce à un financement de 53,5 millions de dollars sur cinq ans accordé par la Banque mondiale. Malheureusement, ce programme a connu un fâcheux contretemps avec le retrait, en octobre 2005, de l’actionnaire principal de la société d’Énergie du Mali (EDM), Saur International (groupe Bouygues). Les divergences avec la tutelle portaient sur le niveau des tarifs mais aussi sur la politique énergétique. « Aujourd’hui, l’électricité est fournie à 80 % par l’énergie hydraulique et à 20 % par l’énergie thermique », calcule l’OCDE. Grâce à des investissements indiens, les autorités souhaitent multiplier de petites unités thermiques sur l’ensemble du territoire. Les bailleurs de fonds préconisent un renforcement de la connexion avec le réseau ivoirien et une exploitation du potentiel hydroélectrique des fleuves Niger et Sénégal.
En matière de transport, la liaison ferroviaire entre Bamako et Dakar, exploitée par la société franco-canadienne Transrail, doit faire l’objet d’investissements. Si on en juge par l’état de la voie ferrée, il y a urgence. La voie fluviale reliant Bamako à Tombouctou est impraticable durant la saison sèche. Cahoteux et relevant par endroits de la piste rurale, les axes vers les pays limitrophes pénalisent l’accès aux ports du golfe de Guinée. Quant au réseau routier national, il est l’un des plus faibles d’Afrique de l’Ouest.
Le fait que Bamako soit considéré comme un bon élève par les institutions de Bretton Woods permet cependant de rester optimiste sur l’avancée de ces différents chantiers. Le Mali a atteint le point d’achèvement de l’initiative en faveur des Pays pauvres très endettés (PPTE) en février 2003 et doit bénéficier de l’annulation de la dette multilatérale annoncée lors du sommet du G8, à Gleanagles (Écosse), en juillet 2005. L’encours de la dette extérieure du pays en baisse depuis quatre ans était estimé à 1 700 milliards de F CFA en 2004, soit 76 % du revenu national, selon l’OCDE. Quant à l’aide par habitant de 45 dollars par an, elle est l’une des plus élevées à l’échelle de la région. Si le retour à la croissance et cette implication internationale constituent, à n’en pas douter, une chance à saisir, cela n’est pas encore suffisant pour réduire la pauvreté. Avec un taux de croissance démographique de 2,4 % en 2005, selon le Programme des Nations unies pour le développement (Pnud), 5 % de croissance ne permettent pas d’améliorer fondamentalement les conditions de vie des populations. Plus de 60 % des Maliens vivent dans la pauvreté.

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