Esclandre dans la Maison de verre

Publié le 12 juin 2006 Lecture : 2 minutes.

Mark Malloch Brown, le numéro deux des Nations unies, a provoqué un esclandre en accusant l’administration Bush d’« utiliser en catimini l’organisation comme outil de politique étrangère », et de s’abstenir de la défendre « contre les attaques dont elle fait l’objet aux États-Unis ». Furieux, John Bolton, le représentant américain, a aussitôt exigé de Kofi Annan, par téléphone, un désaveu « personnel et public ». Pour lui, cette « condescendance envers le peuple américain » est inacceptable. Le secrétaire général a fait savoir qu’il soutenait son adjoint et approuvait l’essentiel de ses propos.
La nomination de Bolton, en 2005, ne laissait pas augurer des relations paisibles entre l’ONU et son principal contributeur. Le « diplomate » n’avait-il pas un jour déclaré que « si l’immeuble des Nations unies à New York avait dix étages de moins, personne ne remarquerait la différence » ? En nommant, au mois d’avril, son directeur de cabinet, l’Anglais Mark Malloch Brown – un ancien administrateur du Pnud et, comme lui, vétéran de l’organisation – au poste de vice-secrétaire général, l’objectif d’Annan, dont le mandat expire à la fin de l’année, était manifestement de mettre ses troupes en ordre de bataille en prévision de rudes échéances.
Entre les États-Unis et l’ONU le conflit est ancien. L’organisation et son secrétaire général sont devenus des cibles de choix pour les conservateurs de tout acabit. Scandales petits et grands sont montés en épingle : de la gestion douteuse du programme « Oil for Food » à l’enrichissement du fils de Kofi Annan, en passant par des accusations de viol contre des fonctionnaires en mission et les dérives de la défunte Commission des droits de l’homme. Ce remue-ménage affaiblit l’audience des États-Unis, qui en tirent argument pour redoubler de critiques. Ce qui fait dire à Malloch Brown « qu’ils campent sur des positions maximalistes, là où des compromis seraient possibles ».
Les États-Unis ont obtenu le soutien de l’Union européenne et du Japon – ils financent ensemble 82 % du budget onusien – pour exiger une gestion plus rigoureuse. Dans l’attente d’une réforme, ils ne donnent leur feu vert, alors que le budget est normalement établi pour deux ans (3,8 milliards de dollars pour 2006-2007), qu’à des tranches de six mois. Pour répondre à leurs vux, Kofi Annan a proposé de renforcer les pouvoirs du secrétaire général, de réduire les effectifs et de sous-traiter de multiples tâches administratives. Problème : les 132 pays pauvres rejettent formellement ce plan, qu’ils interprètent comme une tentative des nantis de faire main basse sur l’ONU, au mépris du principe de l’égalité des membres.
Chargé de l’administration, Malloch Brown subit de plein fouet la contestation d’un personnel très influencé par un certain corporatisme tiers-mondiste. Il ne peut que s’indigner des marques de défiance adressées aux gestionnaires en place, alors que ceux-ci tentent de convaincre les pays pauvres et le personnel de la pureté des intentions des pays riches et de la nécessité d’un compromis.

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