Affaire Ousmane Sonko : vague d’arrestations parmi les soutiens de l’opposant sénégalais

Plusieurs partisans d’Ousmane Sonko ont été arrêtés ces derniers jours, alors que l’Assemblée nationale doit statuer ce vendredi 26 février sur la levée de l’immunité parlementaire du député, principal opposant à Macky Sall, visé par une plainte pour viols.

Guy Marius Sagna, lors d’une manifestation à Dakar en juillet 2019. © DR / Facebook GM Sagna

Guy Marius Sagna, lors d’une manifestation à Dakar en juillet 2019. © DR / Facebook GM Sagna

Publié le 25 février 2021 Lecture : 3 minutes.

Depuis dix jours, les arrestations dans les rangs de l’opposition s’enchaînent. Les militants Assane Diouf, Clédor Sène et Guy Marius Sagna ont été arrêtés à leur domicile, lundi 22 et mardi 23 février. Placés en garde à vue, ils devaient être déferrés devant le parquet ce jeudi pour y répondre des faits de « troubles à l’ordre public » et d’actes « de nature à compromettre la sécurité nationale », après la diffusion d’un message audio sur Whatsapp appelant à la mobilisation en cas d’éventuelle levée de l’immunité parlementaire d’Ousmane Sonko.

Guy-Marius Sagna, secrétaire administratif du « FRAPP- France dégage » n’en est certes pas à sa première interpellation. Ces dernières années, on ne compte plus le nombre de fois où cet activiste qui se définit comme appartenant à « la gauche anti-impérialiste et panafricaine » a été interpelé en marge de manifestations. L’an dernier, il avait ainsi passé trois mois en détention préventive après avoir été arrêté lors d’une action pour protester contre la hausse du prix de l’électricité. Mais cette fois, le mouvement dont il est membre affirme être visé par une vague d’arrestations sans précédent.

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Interpellations et mandats de dépôts

Depuis le 15 février, une demi-douzaine de militants ont en effet été interpelés, au nombre desquels Fatima Mbengue et Patricia Mariame Ngandoul, placées sous contrôle judiciaire après avoir été arrêtées par la Division des investigations criminelles (DIC) pour « menaces de troubles à l’ordre public ». Birame Souleye Diop et Abass Fall, respectivement administrateur et coordinateur du Pastef à Dakar, le parti d’Ousmane Sonko, ont quant à eux été placés sous mandat de dépôt, le 24 février, après avoir été inculpés pour « associations de malfaiteurs, complicité de diffusion de contenus contraires aux bonnes mœurs, menaces de voie de fait et violence ».

« Ces arrestations, ce sont des rafles préventives. L’État du Sénégal cherche à museler la démocratie, estime Alioune Badara Mboup, secrétaire général adjoint du FRAPP. Guy-Marius Sagna a été arrêté sans qu’on puisse lui notifier ce qu’on lui reprochait. » Évoquant des preuves « fabriquées », il récuse les accusations d’appels à la violence qui sont reprochés aux militants arrêtés. À l’en croire, les membres de son mouvement seraient désormais sur leur garde. « Nous savons que nous risquons d’être arrêtés aussi, mais nous n’avons pas peur : c’est le prix à payer pour vivre dans un État de droit », assure Alioune Badara Mboup.

Au sein de l’équipe de défense d’Ousmane Sonko, les avocats ont pour le moment convenu d’observer un scrupuleux silence dans la presse. L’un d’entre-eux, sous couvert d’anonymat, juge cependant que « ces arrestations marquent clairement une volonté stratégique de la part de Macky Sall ». « Les chefs d’accusation avancés sont particulièrement fallacieux. Ces arrestations montrent une volonté politique de réduire l’opposition à une peau de chagrin, affirme encore l’avocat. Mais une démocratie sans contre-pouvoir, ce n’est plus une démocratie. »

Un débat « regrettable » ?

Tandis que le débat sur ces arrestations enfle dans la presse, le parquet s’est pour l’instant montrer très discret, se refusant à communiquer sur le fond des dossiers. Du côté de la majorité, on juge « regrettable » que ces affaires concentre tant l’attention médiatique. « Est-ce vraiment la priorité du moment ? La presse et l’opinion publique devraient davantage s’intéresser à la campagne de vaccination qui, elle, est un véritable enjeu pour tous les sénégalais », s’emporte un ministre contacté par téléphone, refusant de commenter les arrestations tout autant que « l’Affaire Sweet Beauté », du nom du salon de massage où Ousmane Sonko est accusé par une jeune femme de l’avoir violée.

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Mais s’il est vrai que les autorités sénégalaises peuvent se féliciter d’avoir lancé, mardi, la campagne de vaccination grâce à l’acquisition de 200 000 doses du vaccin chinois Sinopharm, dont une partie sera d’ailleurs de ses voisins de la Gambie et de la Guinée-Bissau, nul doute que, ce vendredi, tous les regards seront bel et bien tournés vers l’Assemblée nationale, où doit se décider la levée ou non de l’immunité de celui qui, depuis le ralliement de la majeure partie des anciens opposants à Macky Sall, était devenu l’opposant numéro 1 au président sénégalais.

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