Arrêtez le massacre !

Publié le 13 mai 2008 Lecture : 3 minutes.

Après les primaires du 6 mai en Caroline du Nord et dans l’Indiana, le doute n’est plus permis : Barack Obama a remporté la course pour l’investiture du Parti démocrate pour l’élection présidentielle américaine du 4 novembre. Largement devancée dans le premier état (44 % des voix contre 56 %) et vainqueur de justesse (51 % contre 49 %) dans le second, Hillary Clinton n’a pu empêcher son rival d’accroître son avance, désormais supérieure à cent cinquante délégués. Encore deux cents et ce dernier franchira le cap des deux mille vingt-cinq délégués nécessaires pour être officiellement désigné, à la fin d’août à Denver, par la Convention nationale du parti. Il ne reste plus que six primaires à disputer.
Le sénateur de l’Illinois a donc brillamment surmonté les récentes turbulences rencontrées par sa campagne. Qu’il s’agisse des protestations suscitées par ses déclarations – inopportunes, quoique fondées – sur la propension de l’Amérique profonde à noyer son « amertume » et ses frustrations dans la poudre (sa passion pour les armes à feu) et l’encens (sa religiosité délirante). Ou des propos carrément déplacés (« Dieu maudisse l’Amérique ! ») de son ancien pasteur, l’activiste africain-américain Jeremiah Wright.
Pourtant, sourde aux appels montant de tout le parti – et même de certains de ses partisans -, l’ex-First Lady s’accroche contre toute raison. Convaincue que, « on ne sait jamais ce qui peut arriver en politique », elle refuse obstinément de se retirer, au risque d’aggraver les divisions de son parti et de faire le jeu du candidat républicain, l’ultraconservateur John McCain. De quels atouts, ou de quels expédients, dispose-t-elle encore ?

Issue incertaine
Après l’annonce des résultats dans l’Indiana, elle a publiquement exigé que les résultats des primaires dans le Michigan et en Floride soient pris en compte, alors que ces deux grands États, coupables d’avoir avancé unilatéralement la date des scrutins, ont été mis hors jeu par la direction du parti. Problème : Obama n’y a pas fait campagne et, dans le Michigan, son nom ne figurait même pas sur les bulletins de vote. Il est vrai que, conscient de la faiblesse de ses chances de l’emporter, il s’est prudemment opposé à la tenue d’une nouvelle consultation. Quoi qu’il en soit, l’issue de la manÂuvre clintonienne paraît bien incertaine.
Par ailleurs, la sénatrice de New York n’a apparemment pas perdu espoir de susciter, lors de la Convention nationale, un revirement en sa faveur des « superdélégués », ces grands électeurs – élus et cadres du parti – qui, n’ayant reçu aucun mandat, contrairement aux délégués ordinaires, sont totalement libres de leur vote. Mais on imagine difficilement ces derniers prendre le contre-pied de la « base ». Ce véritable putsch aurait sans nul doute des conséquences catastrophiques lors de l’élection de novembre. Non, l’hypothèse de loin la plus vraisemblable est que les superdélégués voteront pour le candidat qui leur paraîtra le mieux placé pour battre McCain. Et qu’Obama a toutes les chances d’être celui-là.
Enfin, Mrs Clinton peut encore compter sur quelque gaffe monumentale – ou sur quelque « affaire » opportunément exhumée – pour discréditer in extremis son rival. Mais celui-ci, qui dispose d’un staff de campagne en tout point remarquable, a déjà fait la démonstration de son sang-froid, de sa circonspection et de son habileté à se sortir de tous les pièges.

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Aux abois
Plus grave encore, la candidate, qui, dans les temps forts de sa campagne dépense jusqu’à 1 million de dollars par jour, est financièrement aux abois. En janvier, déjà, elle avait été contrainte de consentir à ses équipes électorales, sur sa cassette personnelle, un prêt de 5 millions de dollars (3,2 millions d’euros). Peu avant la primaire de l’Indiana, elle a récidivé : 6,4 millions de dollars cette fois. C’est sans doute la preuve de sa détermination. Mais en même temps de son extrême fragilité : elle est sur le fil du rasoir.
Conscient des risques de cette absurde lutte fratricide, le Parti démocrate semble résolu à y mettre un terme au plus vite – « vers la mi-juin », a fait savoir l’un de ses responsables – en désignant Barack Obama. Reste à savoir si Hillary Clinton acceptera de figurer en seconde position sur le « ticket » pour la présidentielle. Bien sûr, elle ferait une vice-présidente très présentable, mais après tant d’insultes, de coups tordus et d’attaques en dessous de la ceinture, on a quelque peine à y croire.

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