Thérapie par le rap

Le groupe palestinien Dam aligne les tubes. Et fait des émules chez les Arabes israéliens.

Publié le 13 mai 2003 Lecture : 2 minutes.

Dame ! Voilà Dam, un groupe de rap palestinien dont les textes sonnent mieux que des slogans. Le nom polysémique de cette formation constitue à lui seul une drôle de charade où mon premier, et mon tout, signifie « sang » (en arabe et en hébreu) et traduit l’idée d’éternité. C’est aussi l’acronyme phonétique de « The Arabian MCs ». Tout un programme.
S’il ne fallait retenir qu’un seul de leurs morceaux, ce serait incontestablement « Min Erhabi » (Qui est terroriste ?). « Ils ont tant et tant violé l’âme arabe que son ventre s’est gonflé et elle a accouché d’un fils nommé opération suicide », dit le tube. Né en 1999, Dam est composé de Tamer (24 ans), son frère Suheil (19 ans) et de Mahmoud (20 ans), tous les trois originaires de Lod, une des villes israéliennes « où le taux de criminalité est particulièrement élevé ». Ils revendiquent le titre de « premiers rappeurs palestiniens ». Bien sûr, ce trio a fait des émules depuis, et d’autres formations à l’instar de MCW, créées également par des arabes israéliens, ont entrepris de traduire leurs colères en rimes. Chez les uns comme chez les autres, les mêmes thèmes reviennent : l’injustice, la drogue, le crime… « Nos textes décrivent les situations auxquelles nous sommes confrontés dans le quotidien », explique Tamer, fondateur de Dam et ex-étudiant en criminologie. Les titres des albums sont éloquents. Le premier (en anglais) sorti en 1998 s’intitule Stop Selling Drugs. Il sera suivi en 2000 par Min Erhabi (alternant morceaux en arabe et en hébreu). Entretemps, les rappeurs de MCW scandent : « Because I’m an Arab ».
Les membres de Dam tout comme ceux de MCW font partie des 20 % d’arabes que compte la population israélienne, une communauté vulnérable encore plus fragilisée depuis le début de la seconde Intifada. Considérés comme des citoyens de « troisième classe », ils sont frappés par la discrimination et le chômage. On ne s’étonnera donc pas que le rap, mouvement de contestation né dans les quartiers noirs de New York à la fin des années soixante-dix, trouve un écho auprès des jeunes arabes « de l’intérieur ». Heureusement, leurs revendications ne tombent pas toujours dans des oreilles israéliennes sourdes. Dam a séduit le réalisateur Udi Aloni, qui leur a donné la parole dans Local Angel, un documentaire courageux présenté dans le cadre du festival « D’ailleurs et d’ici, Israéliens-Palestiniens, que peut le cinéma ? » qui s’est déroulé à Paris du 26 mars au 1er avril. Venus de Lod pour la circonstance, Tamer, Suheil et Mahmoud en ont profité pour faire avec succès leurs premiers pas sur les scènes européennes (Paris, Bruxelles et Berlin) avant de retourner dans leur « enfer ». Vivement une prochaine tournée !

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