Dieudonné est-il antisémite ?

Publié le 14 avril 2004 Lecture : 2 minutes.

Quelle perspective donner à l’affaire Dieudonné ? Rappelons les faits : Dieudonné est persécuté, et son spectacle du 23 février dernier à l’Olympia a été annulé, parce que, déguisé en rabbin, il a déclaré ironiquement lors d’un sketch diffusé le 1er décembre 2003
dans l’émission On ne peut pas plaire à tout le monde animée par Marc-Olivier Fogiel, sur France 3, qu’il encourageait les jeunes gens des cités à se ressaisir et à rejoindre « l’axe du Bien, l’axe américano-sioniste ». Il a ensuite récidivé au Journal du dimanche en déclarant que « les banquiers juifs qui auraient fait fortune dans la traite des esclaves noirs sont aujourd’hui ses persécuteurs et les persécuteurs des Palestiniens ». Pour la Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme (Licra), de tels propos « expriment un antisémitisme fondamental » et « monsieur Dieudonné accable de ses calomnies tous les Juifs à travers toute l’étendue de l’Histoire et l’universalité de la communauté juive ».
Dieudonné, lui, a immédiatement rejeté cette accusation en expliquant que son sketch ne visait ni plus ni moins qu’à dénoncer la politique d’Ariel Sharon dans les territoires occupés de Palestine. Il estimait dire tout haut ce que beaucoup pensent tout bas. Il suffit d’ailleurs pour s’en convaincre de regarder ses spectacles dans lesquels tout le monde hommes, femmes, Africains, Asiatiques, Arabes, Juifs, Français, musulmans et autres en prend pour son grade. Ainsi que le relève un internaute : « Si Dieudonné est antisémite ; il n’est pas seulement antisémite mais aussi anti-Noir, anti-Arabe, anti-islam, anti-Asiatique, etc. En somme, anti-tout ! » Pour Dieudonné, la campagne de persécution menée à son encontre ne fait que révéler que le Noir est « tout au fond du panier de la misère en France ». C’est sa révolte face à ce phénomène qu’il exprime. Il expose les difficultés qu’il rencontre à mener à terme son projet de film sur l’esclavage Le Code noir car le Centre national de la cinématographie lui refuse l’autorisation de
montage. N’y a-t-il pas, proteste-t-il, des centaines de films sur la Shoah ?
Dieudonné est simplement furieux contre cette façon de monopoliser la souffrance historique. Il la conjugue, lui, au présent, quand il observe que ce sont les Noirs et les Arabes qui subissent le parcours du combattant en France lorsqu’il leur faut trouver un travail ou un logement. Les stéréotypes du Noir fainéant et de l’Arabe escroc ont la vie dure. La communauté noire restera en queue de wagon du train de l’histoire et de tels clichés continueront à nourrir les imaginaires tant qu’elle ne parviendra pas à s’exprimer à travers des leaders qui la représentent « physiquement » et qui, seuls, peuvent la mobiliser pour créer un vrai rapport de force susceptible d’influer sur les décisions qui la concernent. C’est bien dans ce cadre-là qu’il faut entendre les propos de
Dieudonné.

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