Comment dépenser moins et mieux

Dans les pays développés, le vieillissement de la population menace de faire exploser la dette publique d’ici à 2040. À moins que…

Publié le 13 avril 2004 Lecture : 3 minutes.

Que les « anciens », dans les pays développés, vivent de plus en plus longtemps est une très bonne chose, le troisième âge ayant bien droit à un repos mérité après des années de dur labeur. Mais le vieillissement des populations pose un problème fondamental, celui du financement des retraites et des soins de santé, et donc de la pression sur les dépenses publiques.
Alan Greenspan, le président de la Réserve fédérale des États-Unis, a alerté, en février 2003, la commission du Sénat sur le vieillissement de la population en indiquant que ce processus aurait des effets importants sur le budget fédéral. Outre-Atlantique, on estime que la population du troisième âge doublera dans les trente prochaines années pour atteindre 71 millions de personnes.
L’Europe connaît la même tendance. « La proportion de personnes âgées [plus de 65 ans] dépasse celle des jeunes [moins de 15 ans] dans plusieurs pays comme l’Allemagne, l’Italie, le Portugal et l’Espagne », souligne un rapport récent du Conseil de l’Europe. Enfin, le Japon ne comptera plus que trois salariés pour deux retraités en 2050.
Selon un nouveau rapport de l’agence de notation financière Standard & Poor’s, la dette publique des principaux pays occidentaux explosera d’ici à 2040 (voir graphique) si leurs gouvernements ne trouvent pas de nouvelles voies pour maîtriser les dépenses étatiques tout en assurant un service « approprié ». Pas facile alors qu’ils sont contraints à la plus grande rigueur budgétaire, particulièrement en Europe. Depuis le milieu des années 1990, la part des dépenses publiques dans le Produit intérieur brut (PIB) des pays riches a sensiblement diminué. Entre 1993 et 2003, ce ratio est passé de 73 % à 59 % pour la Suède et de 51 % à 40 % pour le Canada. En fait, l’adhésion des pays développés aux grands principes de libéralisation économique et financière s’est traduite par un appui moins important aux secteurs de la production et des services.
« Bien que les dépenses publiques aient un rôle à jouer pour supporter la productivité, doper la croissance et promouvoir l’équité, la plupart des pays développés n’ont plus qu’une petite marge de manoeuvre pour augmenter leur taxation ou accroître leur dette publique », précise la dernière étude de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) parue sur le sujet en février 2004. Dans l’Union européenne, les pays membres ne peuvent pas trop laisser déraper les charges gouvernementales, notamment dans le cadre de l’euro, qui implique le respect du pacte de stabilité. La France et l’Allemagne, qui ont un déficit public d’environ 4 % au lieu des 3 % requis, se font d’ailleurs souvent tancer par la Commission de Bruxelles.
La dernière étude de l’OCDE propose plusieurs réformes pour aider les pays occidentaux à brider leurs dépenses tout en renforçant leur efficacité. D’abord améliorer le processus budgétaire en préparant des programmes à moyen terme et en évitant les trop importants ajustements arbitraires de court terme, sources de dérapages des finances. Les experts de l’Organisation conseillent également de modifier la gestion des ressources humaines dans le secteur public, en intégrant une plus grande flexibilité des emplois. Vers la fin des fonctionnaires ? Peu probable. Mais leur statut devrait évoluer. Notamment avec l’introduction de critères de performance des agents (le fameux « mérite »), qui apparaît comme une solution pour accroître l’efficacité des ressources publiques.
Par ailleurs, l’OCDE conseille aux gouvernements de faire jouer plus fortement la concurrence entre les fournisseurs privés de services publics : évaluation des performances, diversification des sociétés, transparence dans les actions de soumission des prestataires, etc.
Enfin, l’Organisation recommande aux États, et c’est peut-être là la mesure la plus innovante, de mettre en oeuvre des campagnes d’information et des actions pour modifier le comportement des bénéficiaires des services publics. En d’autres termes, il faut faire évoluer les mentalités, l’aide gouvernementale n’étant pas un dû. L’OCDE propose donc de rendre plus visible la part payée par le contribuable, notamment en l’augmentant sur des secteurs stratégiques comme la santé ou l’éducation.
Reste à faire admettre toutes ces évolutions aux citoyens des pays occidentaux. Si cela ne devrait pas trop poser de problèmes en Amérique du Nord, les Européens, habituées à une certaine idée de l’État-providence, risquent de se rebeller. Ce qui promet de belles grèves dans la fonction publique.

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