Où s’arrêtera François Bayrou ?

Publié le 13 mars 2007 Lecture : 4 minutes.

En progression constante dans les intentions de vote – jusqu’à 24 % -, François Bayrou, patron de l’UDF et candidat de la « troisième voie », a déjà la satisfaction d’être devenu – péril oblige – la principale cible des dirigeants de l’UMP. Le transfuge Philippe Douste-Blazy, son ex-camarade de parti, n’a pas hésité à reprendre contre lui la malédiction gaullienne du « chaos ». À cette accusation de mettre en péril la stabilité du régime, Bayrou réplique que, s’il est élu, il formera une majorité et un gouvernement avec « des hommes et des femmes nouveaux » qui refusent la fatalité d’une moitié des Français dressée contre l’autre. Il compte que son « label électoral » constituera alors une sorte de prime dans le désarroi des options et la dislocation des partis. Ni droite ni gauche Peut-il réveiller à son profit cette tentation du « ni-ni » qui sommeille au tréfonds contestataire du tempérament français ? Sa tentative n’est pas sans rappeler une autre union sacrée des centres et des gauches, celle du « Front républicain », dont les candidats, munis de cette seule étiquette et d’un emblématique bonnet phrygien, remportèrent une écrasante victoire aux élections législatives de 1956. La comparaison s’arrête là. Car, à l’amère déception des électeurs qui attendaient Pierre Mendès France, René Coty se laissa imposer Guy Mollet pour Matignon. La IVe République agonisante mourut deux ans plus tard. Mais les institutions de la Ve accroissent les chances de la gageure de François Bayrou.

Les 100 jours de Ségolène
Dans le sondage où elle tient bon derrière Nicolas Sarkozy, un chiffre reste préoccupant pour Ségolène Royal. Son charisme fait toujours merveille, mais sa crédibilité stagne entre 25 % et 30 %. D’où, sans doute, ses confidences à la une du quotidien Le Monde concernant le programme de ses 100 premiers jours à l’Élysée : emploi des jeunes, revalorisation des bas salaires, moratoire sur les organismes génétiquement modifiés, aides à la rentrée scolaire Ce concept des 100 jours vient de la campagne présidentielle de Valéry Giscard d’Estaing, en 1974. Cent jours à partir de l’arrivée à l’Élysée pour agir et faire passer les réformes les plus importantes. Au-delà de cet état de grâce, vieilles habitudes et pesanteurs bloquent de nouveau toute évolution. Ségolène Royal n’allait évidemment pas placer sous ce patronage libéral sa résolution d’« aller vite » dans ce qu’elle appelle « le socialisme du XXIe siècle ». Giscard lui-même avait d’ailleurs emprunté sa théorie des 100 jours aux trois mois que s’était fixés Franklin D. Roosevelt pour mener à bien son New Deal. Comme aimait à dire Alain Peyrefitte, « les politiques se copient beaucoup les uns les autres, mais ils ne paient jamais de droits d’auteur ».

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La bataille du perchoir
Patrick Ollier, le nouveau président UMP de l’Assemblée nationale, n’aura guère plus de trois mois pour goûter les charmes raffinés de sa résidence-jardin de l’hôtel de Lassay. La vraie bataille du « perchoir » aura lieu après les élections législatives du mois de juin.
Si la gauche l’emporte dans la foulée d’une victoire présidentielle, Laurent Fabius compte bien retrouver le fauteuil qu’il a déjà occupé sous le gouvernement Jospin. Il est trop gentleman pour en avoir fait la condition de son soutien à Ségolène Royal, mais assez fin connaisseur des ingratitudes politiciennes pour avoir pris ses précautions.
À droite, Alain Juppé apparaît favori, à moins qu’il ne préfère revenir au gouvernement. Le « meilleur d’entre nous » est plus que jamais le candidat de Jacques Chirac, qui compte sur lui pour calmer les ardeurs réformistes de Nicolas Sarkozy en matière constitutionnelle. Partisan d’une république « moins monarchique », le candidat UMP n’a guère évoqué ce sujet tabou pendant sa campagne. Le peu qu’il en a dit a cependant retenti à l’Élysée comme autant de sonnettes d’alarme. Passe encore qu’il veuille supprimer le droit de grâce, prérogative régalienne par excellence des présidents de la République. Son audace est de remettre en question les deux dogmes sacro-saints du « domaine réservé » du chef de l’État et de la répartition des pouvoirs entre l’Élysée et Matignon. Constatant d’expérience – ô combien ! – que c’est en réalité le président qui gouverne, il entend faire du Premier ministre non plus le chef de l’exécutif, mais « un coordinateur de l’action gouvernementale ». On imagine la tête de Dominique de Villepin à s’entendre appeler « monsieur le Coordinateur ». Pas touche, a aussitôt réagi Chirac, qui a posé un premier verrou en nommant à la tête du Conseil constitutionnel Jean-Louis Debré, farouche gardien des tables de la loi rédigées pour de Gaulle par Michel, son père. En poussant son autre fidèle entre tous, Alain Juppé, à la présidence de l’Assemblée nationale, Chirac se dit qu’il aura fait de son mieux pour préserver après lui l’avenir du régime. En politique, cela s’appelle un vu pieux.

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