Après la reprise, la rentabilité

Publié le 13 mars 2007 Lecture : 5 minutes.

En 2006, 6,5 millions de touristes ont visité la Tunisie contre 6,3 millions un an auparavant. Certes, la croissance reste faible (3 %), mais les recettes ont progressé de 6,3 % pour atteindre 2,75 milliards de dinars (1,6 milliard d’euros) et le pays s’accapare la plus grande part du tourisme maghrébin avec 2,46 millions de visiteurs, en progression de 3,6 % en un an. Autre signe encourageant, le pays arrive en tête des destinations favorites des internautes. D’après « L’observatoire du voyage », réalisé pour la deuxième année consécutive par Expedia.fr, la Tunisie représente 18 % des réservations sur le site, loin devant le Maroc qui n’enregistre que 8 % des réservations ou la Turquie avec 6 %. Grâce à ses performances, le secteur touristique tunisien contribue à hauteur de 6 % au PIB national et jusqu’à 17 % aux exportations. Autant de bonnes nouvelles qui viennent conforter la stratégie de développement du tourisme tunisien. En effet, pour tenir tête à ses rivaux traditionnels que sont le Maroc, l’Égypte et la Turquie, et pour faire face à l’entrée en concurrence de la Libye et de l’Algérie, la Tunisie a investi dans de nouveaux produits à plus forte valeur ajoutée. L’objectif est clair : redorer le blason de la destination et la débarrasser de son image « bas de gamme ».
Depuis les années 1960, l’offre touristique du pays s’est fondée sur l’exploitation quasi exclusive de l’atout balnéaire. Une sorte de « monoculture intensive », qui a abouti au fil des ans à enfermer le pays dans une image de destination bon marché. Mais l’émergence de concurrents comme la Turquie ou la Croatie oblige progressivement la Tunisie à diversifier son offre.

Nouveaux produits
Aujourd’hui, le pays propose un tourisme à la carte avec thalassothérapie, golf, tourisme écologique, saharien, sportif, de croisière… Produit à part entière, le tourisme de plaisance – destiné à ceux qui désirent venir avec leurs yachts ou voiliers – fait aussi partie de ces nouveaux produits appelés à se développer. En 2005, 15 000 plaisanciers se sont répartis entre les 25 ports de mouillage tunisiens, notamment les marinas de Tabarka, Sidi Bou Saïd, El Kantaoui, Yasmine Hammamet, Monastir et Bizerte, toutes dotées des commodités nécessaires. Pour de nombreux hôteliers, ces visiteurs sont une véritable aubaine. Ils constituent une clientèle plus aisée et contribuent à améliorer les taux d’occupation en période de basse saison.
C’est aussi le cas du tourisme lié à la thalassothérapie ou encore au golf, sport promis à un bel avenir dans les pays du pourtour méditerranéen. Une tendance que les participants à la conférence internationale du « Golf Business Forum » organisée en juin 2005 à Prague ont clairement confirmée. Selon l’étude rendue publique à cette occasion par le cabinet d’audit international KPMG, l’Europe, le Moyen-Orient et l’Afrique compteraient à ce jour plus de 4 millions de pratiquants réguliers pour environ 6 750 parcours recensés. Mais avec une croissance de la demande de l’ordre de 6 % par an et une progression de l’offre de 4 %, dans quinze ans, ce sont plus de 7 millions de golfeurs qui se verront proposer plus de 10 000 parcours. Et dans ce domaine, la Tunisie compte bien devenir une destination de référence. Le pays espère rapidement doubler le nombre de ses parcours (une dizaine actuellement) pour augmenter sa fréquentation, de 60 000 golfeurs par an aujourd’hui. Pour cela, les autorités envisagent la création d’un label tunisien, ainsi que l’organisation d’un trophée national pour promouvoir ce sport. Le Royaume-Uni et ses 1,2 million de touristes golfeurs font partie des premiers ciblés par ces actions, suivis de l’Allemagne (500 000 pratiquants), la France (400 000) et les Pays-Bas (250 000).
D’autres spécialités sont également appelées à se développer. C’est le cas de la chasse, de la gastronomie, du shopping ou encore du tourisme médical qui a drainé quelque 1 000 patients en 2005 contre 500 en 2004. Et pour ne rien oublier, le tourisme de croisière promet, lui aussi, beaucoup. En 2006, la Tunisie a accueilli 700 000 croisiéristes, nombre que les autorités se proposent de porter à 1 million d’ici à 2010. Toutefois, lancer de nouveaux produits ne suffit pas. L’objectif immédiat est d’améliorer la qualité de l’existant, à travers notamment le processus de reclassification des hôtels, obligatoire depuis le 1er janvier 2006 et le Programme de mise à niveau hôtelier (PMNH). Il comporte deux volets, dont le premier, d’ordre matériel, concerne la modernisation des équipements nécessaires à l’hôtel pour rehausser son image de marque et améliorer sa visibilité commerciale. Le second volet du PMNH englobe les logiciels de gestion, les télécoms, l’Internet et les techniques de management moderne. Entamé depuis 2006, le coût de ce programme de mise à niveau s’élève à 2,1 milliards de dinars, dont 86 millions fournis sous forme de prêt de l’Agence française de développement (AFD) pour financer la phase pilote. À terme, cette initiative devrait toucher plus de la moitié des 800 établissements que compte le pays.

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Mieux cibler la clientèle
Le tourisme tunisien est encore très fortement dépendant des marchés émetteurs européens, qui ont représenté près de 4 millions de visiteurs sur 6,5 millions (61 %). Après avoir détrôné les Allemands qui furent, pendant des décennies, les principaux touristes reçus en Tunisie, les Français se maintiennent en première position : 1,24 million en 2006 contre 1,17 million en 2005 (+ 6 %). Sur la même période, les marchés roumain, hollandais et yougoslave ont connu des évolutions de 108 %, 18,8 % et 15,5 % respectivement. Le nombre de touristes britanniques, luxembourgeois, autrichiens, russes et tchèques a évolué de 7 %, 6,3 %, 6,5 %, 14,3 % et 5,5 % par rapport à 2005. Mais les Allemands ont boudé (- 4,3 %), tombés de 571 000 en 2005 à 547 000 en 2006, comme les Espagnols (- 1,8 %) et les Italiens (- 4,2 %). Pour pallier ces déficiences, la Tunisie s’intéresse de près à de nouveaux marchés comme celui de la Russie ou de la Chine. Alors qu’ils étaient seulement 29 000 à se rendre en Tunisie en 2002, les Russes sont aujourd’hui plus de 100 000 par an et des indications commencent à apparaître dans leur langue sur les principaux sites touristiques. La Tunisie est devenue leur troisième destination préférée pour leurs vacances d’été, après la Turquie et l’Égypte. En ce qui concerne la Chine, le nombre de visiteurs atteint tout au plus 2 000 pas an, dont une très large majorité d’officiels et d’hommes d’affaires. Il y a pour le moment, beaucoup plus de Tunisiens qui se rendent en Chine… Alors qu’ils sont 20 millions de touristes chinois à parcourir le monde chaque année et seront 50 millions en 2010.
Mais la Tunisie pourra peut-être se consoler, cette année encore, grâce à l’arrivée massive de touristes maghrébins. La palme revient plus particulièrement aux voisins directs. La Libye, avec 1,47 million de touristes en 2006, et l’Algérie (945 000) représentent plus du tiers du total. Mais ces visiteurs ne contribuent guère à l’amélioration de la rentabilité du secteur : leurs dépenses moyennes sont estimées à 70 DT par nuitée, alors qu’un Marocain dépense deux fois plus. Plus généralement, l’évolution du marché s’avère encourageante : jusqu’ici aléatoire, il a tendance à s’inscrire dans la durée et pourrait supplanter à terme celui du Vieux Continent.

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