[Chronique] Un « Jungler » de Jammeh arrêté en Allemagne
Le mardi 16 mars, le Parquet fédéral de Karlsruhe, en Allemagne, a placé en détention provisoire un Gambien soupçonné d’avoir commis des exactions sous le régime du président Jammeh.
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Damien Glez
Dessinateur et éditorialiste franco-burkinabè.
Publié le 19 mars 2021 Lecture : 2 minutes.
La chute d’un régime est généralement aussi rapide que la purge de ses fautes est longue, en témoignent les parcours d’Hissène Habré ou du « Négus rouge », Mengistu Hailé Mariam. Si le facétieux Yahya Jammeh, ancien président de la République de Gambie, vit un exil confortable en Guinée équatoriale depuis quatre ans, les anciens exécutants de ses basses besognes répondent petit à petit de leurs actes.
En 2019, devant la commission Vérité, réconciliation et réparations (TRRC), à Serrekunda, d’anciens membres des « Junglers » – un escadron de la mort au service personnel de Jammeh – reconnaissaient avoir assassiné un journaliste, plus de 50 migrants ouest-africains échoués sur une plage, ainsi que des politiciens soupçonnés de vouloir comploter contre l’État.
« Compétence universelle »
Il y a quelques jours, à Hanovre, un Gambien était arrêté et placé en détention provisoire. Selon les médias allemands, il s’agirait de Bai Lowe, ancien chauffeur de l’unité des forces armées gambiennes chargée d’assassiner, entre décembre 2003 et décembre 2006, les pourfendeurs de l’ancien régime de Banjul. Visé par une enquête pour crimes contre l’humanité, l’homme appréhendé est notamment soupçonné d’avoir participé, le 16 décembre 2004, à l’assassinat par balles de trois personnes, dont Deyda Hydara, doyen de la presse gambienne, cofondateur du journal privé The Point, correspondant de l’Agence France-Presse (AFP) et de Reporters sans frontières (RSF).
Sans donner plus de détails sur le parcours récent de l’interpellé, la justice allemande a invoqué le principe de « compétence universelle » applicable dans les dossiers d’une telle gravité. Bai Lowe pourrait donc être jugé en Allemagne. En juin dernier, c’est aux États-Unis qu’un membre des escadrons de la mort gambiens, Michael Sang Correa, était accusé de torture.
Les meurtriers de Deyda Hydara ont affirmé que Yahya Jammeh était le commanditaire de l’assassinat
Au pouvoir pendant vingt-deux ans, Yahya Jammeh a exercé toutes sortes de violences physiques et morales, menaçant de mort publiquement les défenseurs des droits humains, promettant d’égorger tous les homosexuels qui souhaiteraient se marier, jugeant « très commune » la mort d’un détenu au cours d’un interrogatoire et invitant le secrétaire général des Nations unies d’alors, Ban Ki-moon, à « aller en enfer ».
Les meurtriers de Deyda Hydara ont affirmé que l’ancien chef de l’État était le commanditaire de l’assassinat.
Le rapport d’une commission d’enquête fait également état de détournements pour une somme globale avoisinant 1 milliard de dollars. Toutes ces accusations n’empêchent pas des milliers de partisans de Jammeh de réclamer son retour au pays…
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