Les trois vies de Pierre Messmer
L’ancien Premier ministre publie un livre d’entretiens.
Au début, la voix était nue. Elle racontait les trois vies de Pierre Messmer. La vie du soldat de la France libre. Celle du « colonial », gouverneur de la France d’outre-mer. Celle de l’homme politique, ministre des Armées pendant la guerre d’Algérie, puis Premier ministre de Georges Pompidou de 1972 à 1974. Aujourd’hui, cette série d’entretiens radiodiffusés sur France Culture en 1997 paraît sous forme de livre, enrichie de nouveaux dialogues réalisés en 2001 et 2002 avec le même journaliste, Philippe de Saint-Robert. À cet égard, d’ailleurs, le passage sur le projet de Constitution européenne dont Valéry Giscard d’Estaing est le promoteur ne manque pas de sel. L’ancien président, élu entretemps à l’Académie française, avait saisi cette vénérable institution de l’examen du texte. Bilan : six cents corrections suggérées, coquilles comprises. Commentaire amusé de Pierre Messmer, qui fait lui-même partie des Immortels : « J’ai l’impression que M. Giscard d’Estaing avait parfaitement conscience de [sa] mauvaise qualité. » Mais les considérations ne sont pas uniquement d’ordre sémantique. Sur le fond, le jugement de l’ancien Premier ministre est sans appel : le nombre trop élevé des pays membres risque d’entraîner une paralysie des institutions de l’Union européenne ; cette dernière s’achemine vers un modèle fédéral, dépossédant les États membres de leur souveraineté.
De la bataille d’el-Alamein à la campagne de Syrie, de son parachutage en Indochine à son départ de Dakar, Pierre Messmer n’a pas varié. Exigeant envers la France, dont il dissèque les faiblesses (l’insuffisante modernisation de son armée, l’échec du passage de la conscription à l’armée de métier, une réforme qu’il approuve pourtant…). Modeste, lui qui renonça, à la mort de Pompidou, à se porter candidat à la présidence : « Depuis le début de ma vie active, j’avais toujours eu conscience de dominer ma fonction, petite ou grande. […] Pour la première fois depuis mon entrée à Matignon, je n’étais plus sûr de moi et devais me poser la question : « Serais-je capable d’être président de la République ? » » Mais il conclut : « Après ce que j’ai vu depuis, je pense que mes scrupules étaient excessifs. » Malicieux, en sa sagesse !
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