Tchad : Succès Masra, le cadet qui défiait le maréchal Idriss Déby Itno
S’il n’a pas pu se présenter à la présidentielle du 11 avril, le président des Transformateurs est en première ligne du front contre le sixième mandat d’Idriss Déby Itno. Pour ce chrétien du sud du pays, un seul objectif : devenir chef de l’État.
Comme souvent, le vent souffle sur la capitale tchadienne, N’Djamena. Porteur de sable et de poussière davantage que de fraîcheur, l’harmattan venu du Nord-Est fait onduler le rouge, le bleu et le jaune du drapeau tchadien qui flotte au-dessus du bâtiment du septième arrondissement de la capitale, où Succès Masra a établi son quartier général. Dans les environs, l’opposant est comme chez lui. Il a fait bâtir cet immeuble quelques années auparavant, alors qu’il travaillait à la Banque africaine de développement (BAD), tout comme la résidence où loge sa famille, à quelques encablures. Non loin de la route de goudron qui ne va pas jusqu’à son quartier général, il a aussi investi dans un café où se réunissent régulièrement ses militants.
Lui n’y passe plus guère de temps. Il a déserté les petits restaurants des alentours, où il avait l’habitude de prendre ses repas entre deux réunions de coordination de son parti, Les Transformateurs. En dehors de quelques rendez-vous avec un ambassadeur ou une personnalité de l’opposition, l’essentiel des journées de Succès Masra se limite désormais à arpenter ce QG. Il passe même la plupart de son temps entre les quatre murs de son bureau, sous le regard de ses idoles : son père (décédé cette année du Covid-19), Martin Luther King ou Nelson Mandela. Un ordinateur portable. Un téléphone. Le docteur en économie pilote aujourd’hui son mouvement en partie à distance, transmettant les consignes à ceux qu’il appelle ses « généraux ».
Faire renoncer Idriss Déby Itno
En ce 26 mars, les préparatifs de la marche du lendemain contre le sixième mandat d’Idriss Déby Itno battent leur plein. Une nouvelle fois, l’économiste de formation rappelle les objectifs : obtenir le renoncement du président, mettre en place un dialogue national et une nouvelle Constitution, organiser des élections inclusives et, enfin, conquérir la présidence pour « transformer » le Tchad.
Au rez-de-chaussée du quartier général, une réunion se prépare. Quelques jeunes ont prévu de passer la nuit sur place pour être opérationnels dès les premières heures du jour. Masra sera peut-être parmi eux. Ou non. Depuis peu, il a pris l’habitude de ne pas dormir au même endroit trop souvent. Question de sécurité, assure-t-il, sa tête étant « mise à prix », selon lui, par les autorités tchadiennes. Question pratique aussi : lors d’une précédente journée de manifestation, le 6 mars, les forces de l’ordre avaient encerclé le bâtiment dès quatre heures du matin. Succès Masra et ses troupes y étaient restés enfermés quatre longues journées. Alors aujourd’hui il ruse, élit domicile temporairement à un endroit, puis un autre.
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