Au rendez-vous d’Haïti…

Publié le 12 janvier 2004 Lecture : 2 minutes.

Le Sud-africain Thabo Mbeki a donc été le seul chef d’État étranger présent le 1er janvier, au Palais national, lors des cérémonies commémoratives du bicentenaire de l’indépendance d’Haïti ! Les autres dirigeants, y compris ceux d’Afrique et de la diaspora, également invités, ont préféré s’inscrire aux abonnés absents, pour cause d’agitation sociopolitique à Port-au-Prince. Il faut le regretter. Que la France, défaite militairement au XIXe siècle par des « Jacobins noirs », ait dépêché sur place une délégation de second rang, c’est après tout dans l’ordre des choses, l’ancienne puissance coloniale refusant obstinément de rembourser aux Haïtiens la petite fortune – en or – déboursée depuis 1804 par ces derniers pour préserver une liberté acquise de haute lutte. Mais comment expliquer le « lapin » des plus hauts responsables éthiopiens, sénégalais, algériens, béninois, congolais, ghanéens, jamaïcains, boliviens, colombiens, cubains, qui doivent, pour les derniers cités, leur propre indépendance à l’assistance politique, militaire et financière des fils d’Haïti ?

Certes, il n’y a pas de quoi être fier de la « performance » réalisée en deux cents ans d’indépendance par ce tiers d’île en apnée adossé à la République dominicaine. Sur les trente-sept chefs d’État qui se sont succédé au pouvoir entre Jean-Jacques Dessalines, le « père de l’indépendance », et François Duvalier (1957-1971), le tristement célèbre « Papa Doc », six seulement sont décédés au pouvoir de mort naturelle, quatorze ont été destitués, cinq renversés par un coup d’État, quatre autres tués alors qu’ils étaient en fonction, et huit sont morts en exil. Par ailleurs, deux siècles après l’indépendance, la mortalité infantile en Haïti est la plus élevée d’Amérique, la moitié des enfants de moins de 5 ans ne mangent toujours pas à leur faim et un adulte sur deux ne sait ni lire ni écrire, alors que l’élite dirigeante (pouvoir et opposition confondus), rompue à l’agit-prop, semble se complaire dans la palabre stérile, les jeux d’appareils, la propension au putsch permanent et la transhumance politique.

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Mais, au-delà de ces indicateurs affligeants et de la personnalité controversée du président Jean-Bertrand Aristide, les Africains seraient bien inspirés d’accorder plus d’attention au sort d’Haïti, qui est non seulement la première République noire, mais aussi le plus africain des États d’Amérique du Sud et des Caraïbes. Sa Révolution, une des plus grandes de l’Histoire, est la nôtre. La commémoration de cet événement méritait bien un déplacement massif à Port-au-Prince, car l’échec d’Haïti sera aussi celui de tous les Nègres et, au-delà, de tous les Africains.

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