Les atouts du royaume

Le gouvernement met en avant la proximité géographique avec l’Europe et fait valoir les infrastructures et les compétences du pays.

Publié le 12 décembre 2006 Lecture : 4 minutes.

Une véritable contagion. L’indien Tata, l’américain Accenture, les français Capgemini et GFI Informatique : la liste des grands groupes internationaux intéressés par une éventuelle délocalisation au Maroc de leurs services de gestion administrative, d’assistance téléphonique ou de développement informatique n’en finit pas de s’allonger. Chaque mois ou presque, une nouvelle enseigne s’informe des possibilités d’installation dans le royaume. Après la compagnie d’assurances française Axa, qui a annoncé, fin septembre, son intention d’y transférer 1 500 emplois d’ici à 2012, ce sont maintenant les Anglo-Saxons qui lorgnent le pays. Au début du mois de novembre, une délégation de l’Apebi, l’Association des professionnels marocains des technologies de l’information, s’est rendue à San Francisco pour présenter à un groupe d’opérateurs américains les atouts du Maroc dans le domaine de ce que les experts appellent, dans leur jargon, l’offshoring. L’engouement des investisseurs a surpris Salah-Eddine Mezouar lui-même, le ministre de l’Industrie, du Commerce et de la Mise à niveau de l’économie, qui, jusqu’à présent, cherchait surtout à séduire les entreprises francophones et hispanophones. Le succès du Maroc est d’autant plus significatif qu’il n’est pas le seul pays de la région à s’être positionné sur ce créneau. La Tunisie et, dans une moindre mesure, le Sénégal, s’y intéressent de près également. Sans parvenir, apparemment, à susciter le même intérêt Résultats de la stratégie marocaine.
Le royaume chérifien a d’abord su jouer de sa position géostratégique charnière sur le continent africain. « Par le détroit de Gibraltar, nous ne sommes qu’à 15 km de l’Europe », aime rappeler Kamil Benjelloun, président délégué de CBI. « Nous disposons, en outre, d’un réservoir de main-d’uvre dont ne peuvent se prévaloir ni la Tunisie ni le Sénégal », ajoute Salah-Eddine Mezouar. Avec 16,5 millions d’habitants âgés de moins de 25 ans, le Maroc arrive loin devant ses concurrents maghrébin (5,5 millions) et subsaharien (6,6 millions). Cerise sur le gâteau : les jeunes Marocains ont la réputation d’être particulièrement compétents dans le domaine des nouvelles technologies.
D’autres observateurs mettent davantage en avant la stabilité politique du pays et son environnement technologique satisfaisant. Mais tous s’accordent sur un point : les facilités offertes par la proximité linguistique entre le Maroc, la France, la Suisse et la Belgique. Pour tous, Casablanca offrirait des avantages comparables à ceux de Bangalore ou de Maurice à trois heures d’avion de Paris seulement et sans décalage horaire ! Ces prédispositions mises en évidence par l’étude du cabinet McKinsey entre 2004 et 2005 (voir encadré), n’expliquent pourtant pas, à elles seules, le succès croissant du Maroc auprès des investisseurs. Les autorités se sont également attachées à promouvoir la destination chérifienne par une batterie de mesures financières et fiscales avantageuses.
Le gouvernement a axé sa stratégie sur la création de zones entièrement dédiées aux activités offshoring et des technologies de l’information. Quatre pôles spécialisés ouvriront bientôt à Tanger, Marrakech, Rabat-Salé (Rabat Technopolis) et Casablanca. Tous seront construits, en principe, sur le modèle de Casashore, le projet-pilote situé entre l’aéroport Mohammed-V et le centre-ville de la capitale économique marocaine, dont l’inauguration est prévue pour le troisième trimestre de 2007. Défini par son directeur général, Naim Temsamani, comme « une petite commune peuplée de 30 000 habitants le jour », le Casashore – qui coûte la bagatelle de 2,35 milliards de DH (210 millions d’euros) – sera, à terme, un parc d’affaires de 54 hectares sur lequel seront construits 250 000 m2 de bureaux capables d’accueillir 150 à 200 entreprises spécialisées dans les activités de back-office bancaire ou financier et de développement informatique.
Afin de remplir la mission qui lui a été assignée – dégager 5 milliards de DH de valeur ajoutée et 30 000 emplois à l’horizon 2015 -, il sera équipé « selon les meilleurs standards mondiaux », mais commercialisé pour un modique loyer mensuel de 90 DH le m2. En clair : Casashore a pour mission d’attirer les investisseurs, en leur offrant des locaux high-tech confortables et fonctionnels pour une bouchée de pain. « Isolés, climatisés et précablés, ils bénéficieront du standing des bureaux londoniens ou parisiens », affirme Naim Temsamani. Ils disposeront également d’une dizaine de services d’accompagnement : crèches, banques, postes, coursiers, restaurants, guichets administratifs uniques, sociétés de bureautique, centres de relation avec les ambassades tâcheront de simplifier la vie des salariés. Une attention particulière sera portée, par ailleurs, à l’offre télécoms. Débutée en juin dernier, l’installation d’un câble sous-marin à fibre optique baptisé Atlas Offshore doit être achevée au mois de mars prochain. Long de 1 634 km, il reliera Asilah, une ville située à 40 km au sud de Tanger, à Marseille, et permettra aux opérateurs installés au Maroc la connexion simultanée de plus de 500 000 appels à moindre coût.
Et ce n’est là qu’un début. Les quatre parcs d’affaires offriront également un éventail d’avantages fiscaux et financiers aux sociétés qui choisiront de s’y installer. Outre une « prime aux pionniers » octroyée aux premières entreprises arrivées, l’impôt sur le revenu de leurs employés sera plafonné à 20 %. De nombreux poissons auraient déjà mordu à l’hameçon. « Un mois avant la pose de la première pierre de Casashore, le 13 juillet dernier, 40 % de ses futurs locaux avaient déjà été attribués », confie Abderrafie Hanouf, le directeur général du Technopark de Casablanca. Certains opérateurs ont par ailleurs déjà souhaité voir une généralisation du dispositif réservé aux zones franches à l’ensemble du territoire marocain. Sans y répondre favorablement, le gouvernement a néanmoins prévu des possibilités d’extension au cas par cas. C’est que les économies réalisées par une entreprise bénéficiant de ces avantages sont faramineuses : une réduction de charges de 60 % à 70 % par rapport à ce qu’elle aurait payé en Europe notamment Reste à savoir s’ils seront nombreux à se laisser tenter.

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