Yazid Chir, patron des patrons du 9-3

À la tête de l’antenne du patronat en Seine-Saint-Denis, il milite activement en faveur du recrutement des jeunes issus de l’immigration.

Publié le 11 septembre 2006 Lecture : 3 minutes.

Yazid Chir, 41 ans, PDG de Néoclès, est un self-made man. À la tête d’une Société de services en ingénierie informatique (SSII) florissante, ce Français d’origine algérienne est également le représentant des chefs d’entreprise des treize villes de son département, la Seine-Saint-Denis (le fameux « 9-3 »), au nord de Paris. Un parcours aux allures de success-story.
Avec simplicité et sans misérabilisme, il raconte comment sa famille a quitté l’Algérie en 1963. Comment il a grandi à Saint-Ouen. Et comment son père, chauffeur de taxi, et sa mère, garde d’enfants, l’ont poussé à réussir. « Ils nous ont toujours incités à faire un moteur de ce petit handicap que pouvaient être nos origines. » Un conseil dont il fera son credo. Après un BTS de micromécanique en 1984 et un bref passage dans l’industrie automobile, puis dans l’enseignement, il rejoint une grande entreprise d’aéronautique en tant que directeur commercial. Passionné de technologies de l’information, il se forme tout seul à la micro-informatique. Sa carrière prend un tournant en 1989 lorsqu’il quitte l’aéronautique et devient directeur commercial dans une société de services. C’est là qu’il rencontre ses deux futurs associés, avec lesquels il créera sa propre entreprise quelques années plus tard. À l’origine, une idée de génie : « À l’époque émergeait aux États-Unis une nouvelle technologie dite Citrix, qui permettait de recentraliser les systèmes d’information, ce qui présentait plusieurs avantages, dont la mobilité et la sécurité. Nous étions persuadés de l’avenir d’une telle technologie et voulions absolument l’importer en France. Mais pour cela, il nous fallait créer notre propre boîte. »
C’est ce qu’il fera en 1998, dans sa ville, à Saint-Ouen, en créant Néoclès, une SSII spécialisée dans la mise en place d’infrastructures « Client Léger ». Des débuts modestes mais un développement fulgurant : « Nous avons commencé à trois dans 200 mètres carrés parce qu’on ne voulait pas nous louer une surface plus petite Finalement, c’était plutôt une bonne chose puisque notre effectif est aujourd’hui de 120 personnes, et nous comptons en engager une trentaine d’autres en 2006. » Avec 16 millions d’euros de chiffre d’affaires, l’année 2005 a été particulièrement bonne. C’est d’ailleurs cette même année que la société a remporté le Prix de l’innovation France Télécom dans la catégorie Performance et excellence opérationnelle. Et c’est toujours en 2005 que Yazid Chir a été nommé à la tête du Medef nord-francilien « 93-Ouest », antenne départementale du patronat français.
Dès lors, Yazid n’aura de cesse que de sensibiliser ses homologues régionaux et nationaux aux problématiques de discrimination à l’embauche auxquelles sont particulièrement exposés ceux qu’on appelle « les jeunes de banlieues ». « Moi-même, quand j’envoyais des candidatures, je prenais soin de masquer mon prénom pour passer entre les mailles du filet. Une fois l’entretien décroché, c’était à moi de jouer ! » Pour que les jeunes diplômés de son département puissent à leur tour passer entre les mailles du filet, il a mis en place l’opération « Nos quartiers ont du talent ». C’était en novembre 2005, en pleine crise des banlieues. Une coïncidence puisque l’idée avait germé quatre ans auparavant et que cela faisait près d’un an qu’il uvrait à sa concrétisation.
Contre les quotas, mais pour la reconnaissance des compétences, Yazid Chir comptait beaucoup sur la mobilisation des uns et des autres pour assurer le succès de l’opération. Ses espoirs n’ont pas été déçus : le jour J, 200 jeunes diplômés de 2e et 3e cycles ont pu ainsi présenter leur candidature aux 80 entreprises qui avaient répondu à l’appel. Une opportunité de taille dans un département où, selon une étude, les hauts diplômés ont cinq fois moins de chance qu’ailleurs de se retrouver face à un recruteur. Selon le PDG de Néoclès, les causes sont multiples : « Habiter dans le 9-3 est un frein. Vivre dans un quartier difficile en est un deuxième. Et lorsqu’on a un nom à consonance étrangère, c’est presque fatal. » Six mois après l’opération, le premier bilan est plus que satisfaisant. Sur les 170 jeunes qui ont bien voulu rendre compte de leur expérience, 120 ont passé au moins un entretien avec l’employeur, 56 ont décroché un emploi et 50 sont toujours en phase de recrutement. Une opération qui sera reconduite en octobre prochain à plus grande échelle avec 5 000 diplômés, et qui sera reproduite par d’autres antennes du Medef partout en France.

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