Retour à la réalité

Publié le 11 septembre 2006 Lecture : 3 minutes.

Trois jours après le début des combats, les membres du G8 ont esquissé un protocole d’accord très favorable à Israël. Le projet imputait au Hamas et au Hezbollah l’entière responsabilité de la crise. Israël et le Liban étaient invités à engager des pourparlers diplomatiques. Y avait-il pour Israël un meilleur itinéraire de désengagement ?
Les missiles à longue portée avaient été largement détruits, le quartier Dahiyeh de Beyrouth était démoli, la direction du Hezbollah avait sombré dans la panique, et le Premier ministre libanais, Fouad Siniora, réclamait un cessez-le-feu et un échange de prisonniers. Mais Olmert, Peretz et Halutz montèrent sur leurs grands chevaux. Ils entendaient prouver qu’ils étaient à la fois plus malins, plus courageux et plus combatifs que Ehoud Barak, Ariel Sharon, Shaul Mofaz et Moshe Ya’alon – mais, pour le plus grand malheur d’Israël, ils se sont ramassés misérablement. Ce fut un enchaînement fatal.

Tandis que les hostilités continuaient, le Hezbollah se ressaisissait, les Katioucha continuaient à pleuvoir, le nombre des tués et blessés se creusait ; le nord d’Israël subissait de graves destructions, le tourisme en prenait un sacré coup, le soutien international s’évaporait, les deux derniers pays à maintenir leur ambassade à Jérusalem (le Costa Rica et le Salvador) abandonnaient la capitale ; la dévastation du Liban, et surtout de Beyrouth, transformait les Libanais en ennemis jurés d’Israël ; et au lieu que la dissuasion fasse son office, nous enregistrions les déclarations extrémistes des présidents syrien et iranien.
Pour n’avoir pas cédé face à une armée israélienne nombreuse et techniquement sophistiquée, le Hezbollah fait figure de vainqueur. D’ores et déjà, il réarme. Et le budget israélien, qui devait répondre au malaise social et attaquer la pauvreté, est maintenant recentré sur les dépenses militaires. On continue de proclamer officiellement que c’est la cohésion sociale et la santé économique d’Israël qui comptent, puisque ce sont elles qui gagent la véritable sécurité – mais tout ce beau discours est démenti par les besoins de la guerre. À aucun moment, on n’a pris le temps de calculer le coût de l’obus, du missile, de l’hélicoptère ou du char marginal, alors qu’on sait bien qu’avec le prix d’un missile on peut construire une salle de classe toute neuve.

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Notre illusionniste en chef, Ehoud Olmert, déclare à tout bout de champ qu’il porte l’entière responsabilité de la guerre, mais en réalité il fait son possible pour l’esquiver. S’il n’avait pas peur, il nommerait une commission nationale d’enquête. Mais sachant parfaitement ce que n’importe quel juge de la Cour suprême à la retraite aurait à dire sur son compte, il a inventé le concept bizarre de « comité public d’enquête », dont il désignera lui-même les membres et dont le seul mérite sera de lui fournir une feuille de vigne pour cacher sa honte.
Personne toutefois n’a aucun besoin d’un comité d’investigation, d’enquête ni de clarification. Il est évident pour tous que cette guerre est un fiasco. La seule chose dont on ait besoin est que quelqu’un en assume la responsabilité au lieu de se mettre à l’abri ou de s’esquiver. Les trois meneurs – Olmert, Peretz et Halutz – devraient tirer la seule conclusion possible, à savoir que ce sont eux les responsables d’une défaite honteuse ; qu’ils ont conduit le char de l’État en dépit du bon sens et qu’ils doivent démissionner pour sauver ce qui peut encore l’être.

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