Émigration au féminin

Publié le 11 septembre 2006 Lecture : 2 minutes.

Employées de maison, agricultrices, serveuses, ouvrières, enseignantes, infirmières, travailleuses de l’industrie du sexe, hôtesses En 2005, elles ont été 95 millions à avoir quitté leur pays, par choix ou contrainte, sur un total de 191 millions de migrants, soit 49,6 %. Pour la première fois, le Fonds des Nations unies pour la population (Fnuap) consacre l’ensemble de son rapport 2006 à la féminisation des phénomènes migratoires. Les chiffres sont éloquents : 79 % des personnes quittant l’Indonésie, ou encore 47 % des 17 millions de migrants africains (contre 43 % en 1960) sont des femmes. Elles contribuent pour une large part à l’amélioration des conditions de vie de leur famille restée au pays. Mais le Fnuap pointe les conséquences de l’exode du personnel de santé et plus largement la « fuite des cerveaux ». Le départ des infirmières, sages-femmes et autres médecins vers les pays riches, dont les besoins en personnels qualifiés sont colossaux, pose un grave problème de santé publique pour les pays d’émigration, déjà sinistrés. Selon les évaluations de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), la Grande-Bretagne connaîtra, en 2008, un déficit de 25 000 médecins et 250 000 infirmières. À l’inverse, les centres de santé des pays du Sud se désertifient, les habitants des zones enclavées ne sont plus soignés, sans oublier la pénurie de médicaments et la désuétude des infrastructures et du matériel. Pour le Fnuap, l’aggravation de la situation sanitaire, notamment en Afrique subsaharienne, et la croissance du nombre de personnes atteintes du sida sont incontestablement liées à l’émigration des personnels soignants.

Le rapport examine aussi l’impact du travail des migrantes sur les économies des pays d’origine. Jusque-là, leurs contributions étaient considérées comme secondaires. On les savait généreuses avec leurs parents, se sacrifiant pour les enfants de leur communauté. Mais au regard des sommes transférées et de leurs affectations, le rôle des migrantes se révèle essentiel pour le développement de leur pays. Pour 2005, le montant des transferts des migrants est estimé à 232 milliards de dollars, dont 167 milliards vers les pays en développement, deux fois plus que l’aide publique au développement (APD). Avec de fortes disparités entre les continents. L’Afrique subsaharienne n’a reçu que 1,5 % du total, alors que 43 % des transferts vont vers l’Asie orientale et pacifique, l’Inde et la Chine principalement. Bien que leurs salaires soient moins élevés que ceux des hommes, les migrantes envoient une proportion plus importante de leurs gains à leur famille. Une étude sur les femmes du Bangladesh travaillant au Moyen-Orient a montré qu’elles transfèrent en moyenne 72 % de leur salaire, dont 56 % sont affectés aux besoins quotidiens, à la santé et à l’éducation. Le Fnuap met en avant l’apport des femmes en termes d’idées nouvelles, de promotion de l’égalité, mais aussi d’investissements dans les petites entreprises et de développement des économies locales. Mais leur situation de migrante les expose à de nombreux dangers, notamment l’esclavage sexuel ou domestique. La traite des humains est devenue, en 2006, le commerce illicite le plus juteux dans le monde après le trafic de drogue et celui des armes. Si leurs droits étaient garantis et si les conditions de migration étaient plus sûres, les femmes migrantes seraient un atout majeur pour le développement des pays les plus pauvres.

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