Tunisie : Mofdi Mseddi face à la fronde des journalistes de la TAP

L’inévitable conseiller au Premier ministère a été appelé à la rescousse d’une communication gouvernementale qui a connu plusieurs ratés ces dernières semaines. Explications.

Mofdi Mseddi. © Hichem

Mofdi Mseddi. © Hichem

Publié le 16 avril 2021 Lecture : 3 minutes.

Aucun communiqué officiel n’a confirmé la nomination, le 14 avril, de Mofdi Mseddi au poste de conseiller en communication auprès du chef du gouvernement, mais déjà certains se félicitent du retour de celui qui a occupé ce poste sous différents gouvernements depuis 2014.

Formé à l’Institut de presse et des sciences de l’information de Tunis (IPSI) et titulaire d’un DESS en droit public international et d’un DEA en relations internationales, Mofdi Mseddi, fils du journaliste Kacem Mseddi, est d’abord un enfant de la télé qui est très vite tombé dans la potion magique de la communication institutionnelle. Après un passage à la télévision nationale puis à la radio, il entame son parcours de communicant auprès de l’Office de l’aviation civile et des aéroports (OACA), avant d’être désigné chargé de mission auprès de ministres du Transports successifs jusqu’en 2011.

la suite après cette publicité

Tout-puissant ?

Mais celui dont on dit qu’il a été à l’école du redoutable Abdelwaheb Abdallah, cheville ouvrière du système Ben Ali et grand manitou de la censure des médias, a réellement pris de l’envergure en devenant porte-parole de l’Assemblée nationale constituante présidée par Mustapha Ben Jaaffar. Il connait une brève éclipse en 2013 avant d’être, entre 2013 et 2019, le Monsieur com’ de trois chefs du gouvernement consécutifs : Mehdi Jomaa, Habib Essid et Youssef Chahed.

Le quadragénaire, qui a résisté à trois mandats gouvernementaux mouvementés, est souvent critiqué par les journalistes pour son contrôle, jugé excessif, des médias publics, tous sous tutelle du Premier ministère.

Une position qui aurait pu être délicate, surtout en période électorale, quand le chef du gouvernement Youssef Chahed (entre 2016 et 2020) est devenu lui-même candidat à la présidentielle. Mais dans le microcosme du journalisme tunisien, celui qui circule sans difficulté dans le labyrinthe du palais de la Kasbah tire son épingle du jeu. Il connaît tout le monde, et est « à tu et à toi » avec les grands noms des médias. Revers de la médaille, cette visibilité en a fait un parfait bouc-émissaire : on lui prête notamment une campagne médiatique contre le fils de l’ex-président Béji Caïd Essebsi, Hafedh Caïd Essebsi, quand la rivalité entre la présidence et Youssef Chahed battait son plein en 2018.

On lui prête notamment une campagne médiatique contre le fils de l’ex-président Béji Caïd Essebsi, Hafedh Caïd Essebsi

Mais l’actuel chef du gouvernement, Hichem Mechichi, ne s’est pas arrêté à ces considérations. Le nom de l’inévitable Mofdi Mseddi est ainsi revenu avec insistance dans la quête d’un directeur de communication. Le cabinet de la Kasbah a compris, après six mois de fonctionnement, que la situation socio-économique bouillonnante a rendu encore plus urgente cette recherche de l’oiseau rare. C’est finalement celui qui a déjà évolué plusieurs années durant dans la maison et géré bien des crises qui est apparu comme le profil idoine.

la suite après cette publicité

Conflit avec la TAP

Mofdi Mseddi a déjà du pain sur la planche : il doit affronter dans l’immédiat la brouille entre les médias publics et le gouvernement. Les journalistes de l’Agence Tunis Afrique-Presse (TAP) rejettent ainsi en bloc la désignation de Kamel Ben Younes à la tête de l’agence de presse publique. Ce proche d’Ennahdha, également lié au régime Ben Ali, n’a pu prendre ses fonctions le 13 avril face à la fronde des journalistes. Laquelle a poussé le gouvernement à commettre un grossier faux-pas en faisant intervenir les forces de l’ordre pour entrer Kamel Ben Younes dans l’enceinte de l’agence sous escorte policière.

Mofdi Mseddi doit affronter dans l’immédiat la brouille entre les médias publics et le gouvernement

« Du jamais vu, même Ben Ali n’aurait pas osé faire rentrer la police dans une institution publique » commente un membre du personnel de la TAP. Mofdi Mseddi, s’il est confirmé officiellement au poste de directeur de communication, devra apaiser les tensions, créer des canaux de discussions et faire jouer son carnet d’adresses pour rétablir l’image, assez écornée, d’un gouvernement qui cultive les paradoxes.

la suite après cette publicité

« On doit traiter au même moment du ministre du Tourisme qui assure que la Tunisie est une destination sûre et ouvre ses vols aux voyages en groupes et du ministre de la Santé qui sonne l’alerte et souligne que la pandémie s’emballe » explique, dubitatif, un confrère de journal La Presse.

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

La rédaction vous recommande

Contenus partenaires