Burkina Faso : « Juger Blaise Compaoré n’ajoutera pas à l’instabilité »

Le chercheur français Mathieu Pellerin décrypte l’impact sécuritaire que pourrait avoir au Burkina le procès de Blaise Compaoré, inculpé pour « complicité » dans l’assassinat de Thomas Sankara, et revient sur l’insécurité galopante qui prévaut chez les voisins malien et nigérien.

L’ancien président burkinabè Blaise Compaoré à Milan, en 2012. © Luca Bruno/AP/SIPA

L’ancien président burkinabè Blaise Compaoré à Milan, en 2012. © Luca Bruno/AP/SIPA

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Publié le 19 avril 2021 Lecture : 6 minutes.

Le prochain procès de l’ex-chef de l’État burkinabè, Blaise Compaoré, inculpé pour « complicité » dans l’assassinat de Thomas Sankara, sera-t-il un nouveau facteur de déstabilisation pour le Burkina Faso ? Selon Mathieu Pellerin, analyste Sahel à International Crisis Group (ICG), l’influence de l’ancien président sur la situation sécuritaire depuis sa chute a largement été surestimée.

« Il est rare que la réconciliation se fasse sans justice », insiste le chercheur, qui détaille également pour Jeune Afrique l’urgence, pour les voisins malien et nigérien, de « réparer les fractures entre communautés » afin de freiner les risques d’expansion jihadiste au Sahel.

Jeune Afrique : L’inculpation de Blaise Compaoré dans l’assassinat de Thomas Sankara peut-elle compromettre le processus de réconciliation au Burkina Faso ?

Mathieu Pellerin : Les États confrontés à ce type de défis se heurtent à la difficulté de trouver le juste milieu entre réconciliation et justice. Il est rare que la réconciliation se fasse sans justice, et je crois qu’à ce sujet le président Roch Marc Christian Kaboré a toujours été clair. En 2016, il estimait que les procès, dont celui sur les responsables présumés de l’assassinat du président Thomas Sankara, étaient le point de départ d’une vraie réconciliation nationale.

Je ne crois pas qu’un tel procès puisse rajouter de l’instabilité… L’influence de l’ancien président sur la situation sécuritaire depuis 2015 a été largement surestimée.

La question terroriste fait-elle partie du processus de réconciliation souhaité par le président Kaboré ? 

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Elle est intimement liée à la question de la réconciliation. Les jihadistes se sont développés au Burkina en exploitant toutes les fractures locales entre communautés, fondées très souvent sur l’exploitation des ressources. Il convient de réparer ces fractures et de réconcilier des communautés qui ont commis de nombreuses violences depuis 2016 au Sahel puis dans le Centre-Nord, l’Est, le Nord et dans la boucle du Mouhoun. Le chantier de la réconciliation est clairement un moyen de freiner l’expansion jihadiste.

Au Mali, au Burkina et au Niger, les groupes armés continuent de dicter leur loi. Comment jugez-vous la situation sécuritaire dans ces trois pays ?

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Au Burkina Faso et au Niger, la légère baisse du nombre des attaques, qui a été observée malgré les évènements de ces derniers jours, tient à la fois à l’efficacité du renforcement des effectifs de l’opération Barkhane, aux affrontements entre le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans [GSIM] et l’État islamique dans le Grand Sahara [EIGS], mais aussi au changement d’approche du Burkina, qui ne privilégie plus seulement l’option militaire.

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