Révolution numérique : « Il n’y a pas de raison que l’innovation ne vienne pas de notre continent »

L’impact des nouvelles technologies sur les entreprises africaines commence à peine à se faire sentir. Plusieurs CEO parmi lesquels Ashish Thakkar, Bob Collymore, directeur général de Safaricom, et Abdeslam Ahizoune, son homologue chez Maroc Télécom, ont évoqué les solutions qui permettront au continent de tirer pleinement profit de cette révolution.

Session plénière sur la révolution numérique en Afrique, durant le Africa CEO Forum 2014. © Eric Larrayadieu/JA

Session plénière sur la révolution numérique en Afrique, durant le Africa CEO Forum 2014. © Eric Larrayadieu/JA

Publié le 19 mars 2014 Lecture : 4 minutes.

L’émergence du capitalisme africain coïncide avec une formidable période d’innovation technologique. Mais si les technologies de l’information se développent très rapidement, leur impact sur la productivité des entreprises n’est pas encore suffisant. A l’occasion de la dernière assemblée pleinière du Africa CEO Forum, plusieurs intervenants de premier plan ont débattu des effets positifs, des freins et du potentiel des nouvelles technologies.

Réussites

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Olebogeng Mogale, directeur associé de KPMG en charge des services de banque mobile, a introduit la session en brossant un portrait des réussites du continent: « Les technologies permettent non seulement de connecter les gens entre eux, mais aussi aux marchés, comme par exemple les fermiers qui peuvent accéder au prix des matières premières par SMS ». Et de rendre hommage, entre autres, au Ghanéen Bright Simons, fondateur de mPedigree, un système mobile qui permet de vérifier l’authenticité des médicaments par SMS.

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« La révolution numérique concerne tant les applications que les appareils ou les infrastructures qui permettent à la fois d’augmenter les revenus et la productivité », a-t-il rappelé avant d’affirmer que, malgré des progrès extraordinaires, l’Afrique reste très en retard par rapport au reste du monde selon une majorité de critères de connectivité et de pénétration d’internet. « Mon intention n’est pas de dresser un portrait trop sombre, mais de parler des possibilités de progrès. La pénétration d’internet augmente, mais ce n’est pas encore assez ! ».

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Le rôle de l’Etat en débat

Le rôle des gouvernements a été amplement débattu. Abdeslam Ahizoune, PDG de Maroc Télécom a rappelé que certains pays africains sont dans le peloton de tête des pays les plus développés en mobile : « Cela est le cas parce que les pays africains ont suivi le développement du marché en abandonnant les politiques monopolistiques et en favorisant les investissements étrangers ».

« Il y a un tas d’argent à gagner en Afrique dans les nouvelles technologies, que ce soit dans les services de santé, dans les services financiers, dans l’agriculture, etc. Pour parvenir à réaliser ce potentiel, nous devons écarter les gouvernements de la voie », a martelé Safroan Yeboah-Amankwah, associé senior de MCKinsey TMT & Business Tech Practices. Une affirmation qui n’a pas convaincu les autres intervenants.

Bob Collymore, directeur général de Safaricom, le premier opérateur au Kenya, a notamment insisté sur l’importance des gouvernements, à la fois pour la mise en place d’un environnement réglementaire favorable et pour l’éducation technologique. « Mais il faut que le monde des affaires oriente et accompagne le gouvernement », a-t-il nuancé. Pour l’entrepreneur britannique d’origine ougandaise, Ashish Thakkar, en la matière, tous les pays ne se valent pas : « Je travaille dans 19 pays, beaucoup de nos gouvernements disent qu’ils veulent être innovants. Ce n’est pas le cas de tous, mais un pays comme le Rwanda avance très vite dans ce domaine ».

Innovations remarquables

Bob Collymore a rappelé que plus de trois milliards de dollars dorment sous les matelas au Kenya et restent improductifs : « Nous avons proposé des solutions pour mettre cet argent au travail ». Autre innovation kényane, l’installation de panneaux solaires sur les toits directement connectés à un compte de monnaie mobile mPesa. Pour le Ghanéen Yaw Owusu, directeur général de Gateway Innovations, l’une des innovations les plus intéressantes à mettre en place serait une carte identité qui donne accès tant aux services mobiles qu’au services financiers. Il évoque également la possibilité de distribuer des microcrédits via la téléphonie mobile.

Il n’y a pas de raison que l’innovation ne vienne pas de notre continent. Nous devons être un peu fous dans ce domaine.

Les panélistes ont également évoqué les défis à relever pour dépasser les barrières du continent. Pour Abdeslam Ahizoune le défi de demain est de deux sortes : « Il ne faut pas se laisser berner par le mobile, il faut une infrastructure haut débit pour soutenir le développement de l’internet mobile ».

« S’il n’y a pas de très haut débit, l’Afrique risque de rater ce virage », a-t-il affirmé avant de relever que le deuxième défi est le contenu : « Tout est dominé par le contenu américain, que ce soit par Facebook ou Google », a-t-il regretté.

Ashish Thakkar a renchéri dans ce sens : « Il nous manque nos propres contenus, mais il n’y a pas de raison que l’innovation ne vienne pas de notre continent. Nous devons être un peu fous dans ce domaine ».

« Nous avons un problème qui me semble très facile à résoudre, a-t-il poursuivi. Il y a ce mythe que nous n’avons pas de compétences. Mais maintenant avec les câbles sous-marins, nous avons un meilleur accès. Nous avons tout ce qu’il fat pour mettre tout ça en route »

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