Mandla Mandela
Héritier d’une lignée de vingt générations de chefs xhosas, le petit-fils de Madiba a repris le flambeau de ses ancêtres. Sans exclure de donner un jour une tournure plus politique à sa position tribale.
Le temps marque une pause à Mvezo, au coeur de l’ex-bantoustan du Transkei. L’inkosi (chef xhosa) se tient droit devant les ruines de petites huttes circulaires. Son imposante silhouette – il mesure près de 1,90 m – lui donne une prestance particulière. Ses parures de perles et la peau de lion qui tombe le long de son épaule rappellent son statut et sa lignée, celle de vingt générations de chefs. C’est un Mandela. Les ruines qu’il regarde sont celles où est né son grand-père Nelson il y a quatre-vingt-dix ans.
« Si je suis l’homme que je suis aujourd’hui, c’est grâce à lui », dit Mandlasizwe Dalibhunga Mandela, 33 ans, dont le père, Makgatho, second fils de l’ancien président (l’aîné, Thembekile, est mort en 1969), est décédé en 2005. En xhosa, son nom signifie « force de la nation ». Il a la majesté de son aïeul, celle du jeune Madiba, qui, en tenue traditionnelle, s’avançait fièrement devant une cour blanche lors de son procès pour trahison, en 1962.
Le futur chef d’État sud-africain a préféré se concentrer sur les affaires nationales et internationales, avec le résultat que l’on sait. Son descendant entend réparer l’injustice infligée à son arrière-grand-père, dépossédé de son titre de chef par un magistrat blanc en 1919. En avril 2007, il est intronisé. Sous les yeux de Nelson, qui déclare ce jour-là pouvoir désormais reposer en paix, il devient gardien des coutumes xhosas.
Le sens du devoir est une marque familiale. Il explique le choix de Mandla d’abandonner ses études d’informatique pour un retour à la vie rurale. C’est que la tâche est sérieuse. En tant que chef, il est responsable du bien-être de son peuple. « Cette région rurale est la plus pauvre du pays. Nous faisons face à de nombreux défis, jusque dans les besoins les plus basiques. »
Si le taux de chômage avoisine ici 70 %, le jeune homme est optimiste. Des solutions locales existent, croit-il. Son abnégation sert son discours en tout cas : « Tout mon salaire [versé par le gouvernement aux leaders traditionnels] sera donné à mon peuple, de la même manière que les revenus présidentiels de mon grand-père étaient reversés à la Fondation Nelson-Mandela. »
Avec ce grand-père, Mandla partage une foi inébranlable dans l’éducation – la seule voie du développement, à ses yeux. Ainsi a-t-il organisé des séjours d’études pour les jeunes de son village, une cérémonie traditionnelle au Swaziland voisin ou encore un récital de la chorale locale en Chine, en marge de l’élection de Miss Monde 2007.
Mandla Mandela n’est pas un homme d’État. Mais son aura s’étend au-delà des seules terres vallonnées du Transkei. Sa position de chef traditionnel l’a amené à conseiller les familles royales du KwaZulu-Natal ou du Swaziland : « Pour le moment, je m’en tiens à ce que me demande mon peuple. Comme mon grand-père, je me place en serviteur. Si ma position tribale doit prendre une tournure plus politique, alors j’assumerai. » En attendant, quand une équipe de télévision française vient préparer un prime time sur l’Afrique du Sud, c’est lui qui est invité. Ses études sur la résolution des conflits en Afrique, et plus particulièrement en Afrique australe, donnent du crédit à ses propos. Son ascendance aussi, bien évidemment.
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