RDC – Jean-Pierre Bemba : « Je n’ai aucune revanche à prendre sur Joseph Kabila »

De retour dans la majorité, aux côtés de Félix Tshisekedi, après quinze années dans le costume d’opposant, Jean-Pierre Bemba sort du silence. Pourquoi a-t-il choisi de rallier le chef de l’État, dont il avait pourtant contesté l’élection ? Quelles sont ses relations avec Joseph Kabila ? L’Union sacrée peut-elle résister aux frustrations des uns et des autres ? Le président du MLC se confie en exclusivité à Jeune Afrique.

Jean-Pierre Bemba, à Kinshasa le 21 avril 2021. © Caroline Thirion pour JA

Jean-Pierre Bemba, à Kinshasa le 21 avril 2021. © Caroline Thirion pour JA

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Publié le 28 avril 2021 Lecture : 12 minutes.

Entre les quatre murs de sa cellule du pénitencier de Scheveningen, à La Haye, Jean-Pierre Bemba a appris la patience. Rallié au président Tshisekedi fin 2020, le patron du Mouvement de libération du Congo (MLC) savoure un discret retour au cœur du pouvoir. Qu’importe si son parti n’a obtenu que trois ministères dans le nouveau gouvernement. lui qui n’avait plus appartenu à la majorité depuis la fin de son mandat de vice-président, en 2006, sait qu’il revient de loin.

Quinze années se sont écoulées. « Une vie entière à son échelle », s’exclame un proche de Bemba. Arrêté en 2008, deux ans après sa candidature malheureuse à l’élection présidentielle de 2006, condamné par la Cour pénale internationale (CPI) à 18 ans de prison pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité puis acquitté à la surprise générale dix ans plus tard, le chef du MLC a tenté de prendre sa revanche lors de la dernière présidentielle. Empêché par la Cour constitutionnelle de se présenter à cause d’une condamnation pour subornation de témoin qui invalidait sa candidature, l’ancien chef de guerre était depuis l’un quatre piliers de l’opposition réunis au sein de la coalition Lamuka.

Aujourd’hui réinstallé dans la résidence kinoise de son père, grande bâtisse de l’avenue Pumbu bordée par un terrain de tennis sur lequel il travaille son coup droit plusieurs fois par semaine, Jean-Pierre Bemba tente de rattraper le temps perdu. Très discret lorsque Tshisekedi et Kabila se livraient un bras de fer au sommet de l’État, occupé à restructurer son parti, affaibli par ses dix années de détention et concentré sur sa demande de dédommagement à la CPI (il a été débouté en mai dernier), le patron du MLC a un temps semblé en retrait de la scène politique.

À plusieurs reprises ces derniers mois, il avait d’ailleurs refusé de se prêter au jeu de l’interview, jugeant le timing inopportun pour évoquer ce dossier devant la CPI sur lequel il ne souhaite plus s’exprimer ou son avenir personnel, dont il sait qu’il ne dépend pas entièrement de lui. Colosse de la vie politique congolaise, où il a souvent traîné l’image d’un homme impulsif, Jean-Pierre Bemba tente aujourd’hui d’endosser le costume du stratège rassembleur et prudent.

Jeune Afrique : Vous vous êtes montré très discret depuis l’arrivée au pouvoir de Félix Tshisekedi en janvier 2019. Pourquoi vous être ainsi effacé ?

Jean-Pierre Bemba : Je ne me suis pas effacé. J’ai passé beaucoup de temps à restructurer le MLC, de la base jusqu’au sommet, et j’ai sillonné le pays. Je pense simplement qu’il ne fallait pas ajouter de la confusion à la confusion. Il ne servait à rien d’attaquer l’un ou l’autre. Quant à notre parti, il n’est pas resté silencieux. Il est même intervenu régulièrement sur les questions importantes de gouvernance et de sécurité.

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Le MLC fait partie du gouvernement du Premier ministre, Sama Lukonde Kyenge. C’est la première fois depuis quinze ans que votre parti rejoint l’exécutif. Avez-vous tourné la page de l’opposition ?

Le MLC était dans l’opposition depuis 2006 parce que nous défendions les valeurs que sont la démocratie, l’État de droit, la bonne gouvernance et une gestion transparente des affaires de l’État. Mais c’est une page que nous avons tournée.

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Avec trois ministres, peut-on dire que le MLC est représenté à la juste mesure de son poids politique ?

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