Kadhafi se fait une virée estivale

Visite du « Guide » chez son voisin. Au menu : tourisme culinaire… et idéologique.

Publié le 12 août 2008 Lecture : 2 minutes.

Excédés par les hausses successives du carburant à la pompe, les automobilistes tunisiens ont cru qu’ils allaient avoir une agréable surprise. Des ouvriers s’étaient affairés pour remplacer les enseignes des stations d’essence Mobil par celles de Naft Libya. La Jamahiriya allait-elle enfin faire profiter son voisin de ses énormes ressources en hydrocarbures en commercialisant l’essence au prix qu’elle pratique chez elle, soit quatre fois moins cher qu’en Tunisie ? Les automobilistes tunisiens attendent ce geste de longue date. La visite de Mouammar Kadhafi à Tunis, du 4 au 6 août, a même failli convaincre les plus sceptiques, qui se sont dit que le « Guide » allait peut-être annoncer la bonne nouvelle sur place, au nom de la solidarité maghrébine. Le jour de son arrivée, des automobilistes ont même boycotté les stations Agil, Shell, BP et Total pour se ruer sur celles de Naft Oil. « J’étais prêt à y aller avec un drapeau vert libyen flottant sur ma voiture », raconte cet automobiliste rencontré à la station à l’entrée de La Marsa, dans la banlieue nord de Tunis. Las, les prix n’ont pas bougé d’un iota. Business is business : Naft Oil a bien acheté le réseau de distribution d’Exxon Mobil Oil Tunisie, qui détient une part de marché de 20 %. Mais pour le consommateur, cela ne se traduit que par le changement d’enseignequi s’est accéléré pour que Kadhafi en voie une lors de son passage par La Marsa, sur le chemin de la résidence d’hôtes à Gammarth.
Sa visite a d’ailleurs pris la tournure d’une virée telle que celles qu’effectuent actuellement, comme à l’accoutumée, des dizaines de milliers de ses compatriotes pour goûter aux délices des nuits estivales chez le voisin tunisien. Le « Guide » a eu un simple entretien avec le président Ben Ali, et a inauguré avec lui une cité de 1 200 habitations construite en cinq ans à Sidi Hassine Sejoumi, une localité défavorisée, à l’ouest de la capitale. La Libye ayant participé à son financement, la cité a été baptisée Cité Omar el-Mokhtar, illustre résistant libyen durant la colonisation italienne.
La délégation, composée des célèbres amazones (gardes du corps de Kadhafi) et, bizarrement, d’une dizaine de hauts officiers de l’armée apparemment venus en touristes aussi puisqu’on n’a pas signalé d’entretiens officiels, ne comprenait pas de ministres, à l’exception de celui des Affaires étrangères. Kadhafi a fait du tourisme culinaire et idéologique. Culinaire, avec un dîner dans un restaurant chic de Gammarth. Idéologique, avec des heures et des heures de conférences, suivies de débats, d’abord avec des intellectuels, puis avec des femmes. Le clou a été une rencontre avec des universitaires et des étudiants à l’Institut national des sciences appliquées de technologie (Insat), où il a été fait docteur honoris causa en civilisation arabo-islamique de l’université du 7-Novembre de Carthage en présence du ministre de l’Enseignement supérieur.
Kadhafi a également rencontré le prince Edward, fils de la reine Élisabeth II, représentant spécial de la Grande-Bretagne pour le commerce international et l’investissement, qui se trouvait en vacances en Tunisie.

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