Un nouveau vaccin à l’essai

Publié le 8 août 2003 Lecture : 3 minutes.

Une vingtaine de volontaires suisses et britanniques testent, depuis le 4 août, un nouveau vaccin antisida. « Il s’agit d’un vaccin dirigé contre le sous- type C du virus, le plus fréquent dans le monde et très expansionniste », indique le professeur Marc Girard, président français du consortium européen EuroVacc, qui est à l’origine du projet. C’est la première fois qu’est mené sur l’homme un essai de vaccin ciblant ce sous-type du virus, qui fait des ravages en Chine et en Afrique. Il existe dix sous-types différents du VIH répartis par grandes zones géographiques. Plus de vingt laboratoires représentant huit pays européens travaillent depuis cinq ans sur ce vaccin recombinant baptisé Nyvac-C. Il a donné des résultats encourageants sur les animaux. « Mais on ne peut pas extrapoler, affirme le professeur Girard, il faut aller voir chez l’homme. » Ce programme de recherche est financé par l’Union européenne à hauteur de 12 millions d’euros. Depuis plus de vingt ans que le VIH a été identifié, les chercheurs rêvent de trouver « l’arme ultime » que serait un vaccin efficace. Le fait nouveau, désormais, est qu’on y croit. Du français Aventis-Pasteur à l’américain Merck en passant par le britannique GlaxoSmithKline, les plus grands laboratoires poursuivent leurs travaux. Mais le VIH est un adversaire redoutable, et il faut explorer des pistes multiples.

Les vingt-quatre volontaires participant à la première phase d’essais sur l’homme de Nyvac-C sont répartis entre le Centre universitaire hospitalier du canton de Vaud, à Lausanne, et le St Mary’s Hospital de Londres. La plupart sont étudiants en médecine ou travaillent à l’hôpital. Indemnisés chacun à hauteur de 680 euros, ils souhaitent avant tout faire avancer la recherche. Tous sont séronégatifs et à bas risque de contamination. « Le vaccin que nous leur injecterons est un virus modifié en laboratoire, explique le professeur Giuseppe Pantaleo, chef du service d’immunologie et d’allergie du centre hospitalier du canton de Vaud. Il est incapable de se diviser et a perdu son pouvoir pathogène. » Dans ce virus atténué [virus de la vaccine, utilisé pour d’autres vaccins], qui sert de « transporteur », les chercheurs ont introduit des gènes provenant du VIH. Le transporteur pénètre dans les cellules, et les gènes viraux qu’il contient sont censés déclencher une réponse immunitaire.
Pour le moment, les chercheurs veulent s’assurer que le candidat vaccin est bien toléré par l’organisme, c’est la phase 1 des essais. « Bien sûr, nous ne résisterons pas à la tentation de voir quels effets immunitaires il provoque, avoue le professeur Girard, mais nous surveillerons surtout l’apparition éventuelle de rougeurs, de douleurs ou de fièvres. » Les participants ne subiront que deux injections en un an. « Si nous leur faisons trop de vaccins successifs, explique le professeur Girard, nous provoquerons une réaction anticorps contre le virus de la vaccine et il ne pourra faire son office de transporteur puisqu’il ne peut pénétrer dans les cellules. » Le matériel génétique du virus du sida n’est alors pas exposé, et la réaction immunitaire recherchée n’est pas provoquée. Autre mystère dans la quête du vaccin idéal : « Notre vaccin active la production de cellules tueuses capables de détruire les cellules infectées, déclare le professeur Girard, mais nous ne savons pas encore fabriquer de vaccin qui, par le biais des anticorps, empêcherait le virus du sida d’entrer dans une cellule saine. »

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En cas de succès, ce nouveau vaccin permettrait aux bénéficiaires de se comporter comme les rares « non-progresseurs à long terme », qui sont séropositifs, mais ne déclarent pas de sida. Leur production naturelle de cellules tueuses leur permet de conserver une charge virale très basse. Les premiers résultats des essais menés en Suisse et en Grande-Bretagne seront connus fin 2004. Suivront deux autres phases, qui serviront à tester sur deux cents volontaires la capacité du vaccin à générer une réponse immunitaire, puis sur des milliers de personnes « à haut risque » sa capacité à les protéger du sida. Même si le candidat vaccin franchit le cap de la phase 3, contrairement à celui de la firme américaine VaxGen, qui avait donné des résultats très décevants l’année dernière, il ne serait pas disponible avant une dizaine d’années. « Mais, pour commercialiser ce vaccin en Afrique ou en Chine, indique le professeur Girard, nous devrons recruter des volontaires africains et chinois et reprendre avec eux les essais en phase 1. » n

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