Épilogue annoncé

Le Gabon a été rétrogradé à la quatrième place des pays producteurs au sud du Sahara. Et il y a peu d’espoir d’inverser la tendance.

Publié le 6 août 2003 Lecture : 3 minutes.

Le gouvernement ne s’en cache pas : le pays a son avenir pétrolier derrière lui. Maintes fois annoncée, l’heure de se pencher sérieusement sur l’après-pétrole a sonné. En 2002, le Gabon a été rétrogradé à la quatrième place des producteurs d’Afrique subsaharienne, délogé de la troisième marche du podium par le voisin équatoguinéen. Toujours en tête du palmarès : le Nigeria, suivi de l’Angola.
Pour le Gabon, l’affaire n’est pas mince. Sur les cinq dernières années, le secteur pétrolier a représenté, en moyenne, 81 % de ses exportations, 42 % du Produit intérieur brut (PIB) et 66 % des recettes budgétaires de l’État – sans parler du poids des activités parapétrolières dans l’économie. Bien sûr, le phénomène n’est pas nouveau. La production d’or noir diminue progressivement depuis 1998, conséquence, entre autres, de la baisse de rendement du site onshore de Rabi-Kounga, situé dans la région de Gamba (au sud-ouest du pays), qui contribuait, dans ses meilleures années, à plus de 60 % de la production nationale. Une défaillance qui s’ajoute à l’absence de découverte significative de gisements au cours de la dernière décennie. Résultat : après avoir culminé à 18,46 millions de tonnes en 1997, la production ne devrait atteindre que 12,3 millions de tonnes cette année. Pis : les prévisions font état d’une chute de 50 % d’ici à cinq ans (6,2 millions de tonnes en 2008). De nombreux observateurs estiment toutefois que la révélation de ce scénario catastrophe a surtout pour but de noircir le tableau à quelques semaines d’une renégociation périlleuse de la dette gabonaise avec le Club de Paris (voir pp. 84-86).
Si, comme le montre le graphique ci-dessous, la chute de la production a été freinée ces deux dernières années, c’est parce que les pétroliers ont, en quelque sorte, « raclé les fonds de tiroir ». En mettant en production des gisements de taille modeste et, surtout, en profitant d’importantes avancées technologiques, qui leur ont permis de récupérer des fonds de puits sur les champs déjà exploités. Les compagnies ont d’ailleurs beaucoup investi dans ces techniques depuis 2001. À titre d’exemple, Elf-Gabon, filiale de Total, a dépensé près de 85 millions de dollars (75,1 millions d’euros) en 2002.
Ces nouvelles technologies sont également appliquées sur le champ pétrolier de Rabi-Kounga, exploité par Shell-Gabon. Ce puits, d’où sont sortis près de 500 millions de barils en huit ans, fait l’objet de toute l’attention de son opérateur, qui cherche à stabiliser son débit grâce à de nouveaux outils high-tech comme la surveillance assistée par ordinateur. « Le taux de récupération moyen dans un puits est de l’ordre de 40 %, explique Franck Denelle, PDG de Shell-Gabon. Il était jusqu’à présent de 42 % sur Rabi. C’est déjà le taux le plus élevé au monde, et nous allons tenter d’atteindre les 45 %, voire 50 %. » Cette nouvelle phase d’exploitation, baptisée « Rabi 3 », porte sur 50 millions de barils et nécessite un investissement de 150 millions de dollars, notamment pour équiper les quelque 200 puits du champ d’un système de numérisation qui en feront, selon la formule du patron de Shell-Gabon, « des puits intelligents ». En avril dernier, l’État a d’ailleurs renouvelé pour dix ans le permis de production de l’opérateur, qui devrait arriver à expiration en 2007. Shell-Gabon conservera donc ses droits jusqu’en 2013, année où il pourra faire jouer son option sur deux nouvelles périodes de cinq ans, durée indispensable à la rentabilisation des investissements.
L’autre solution pour enrayer ce déclin de la production consiste à intensifier les forages en offshore ultraprofond, c’est-à-dire entre 3 000 et 3 500 m. Shell-Gabon, qui a foré quatre nouveaux puits depuis 2001, n’a, pour l’instant, mis au jour que des traces d’hydrocarbures. De son côté, Elf-Gabon a signé en avril 2002 un permis d’exploration sur un site offshore à l’extrêmité sud du pays. Mais, sachant qu’à cette profondeur une découverte ne peut produire ses fruits avant un délai compris entre cinq et sept ans, le gouvernement va devoir se montrer patient.

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