Des trésors à déterrer

Publié le 6 août 2003 Lecture : 2 minutes.

Qui est le héros de Dalembert ? Mais c’est toi, hypocrite lecteur, c’est toi. N’as-tu pas rêvé d’être libre de toute attache, de bourlinguer de ville en port, d’oublier ta fatigue dans des hôtels borgnes où des femmes aux oeillades mortelles tiennent la caisse et te glissent des billets doux qui ne te sont d’aucun usage ? Ne désires-tu pas requinquer ton corps endolori – par la route, par le rêve, par les radasses – au rhum de contrebande, puis pousser, la nuit venue, la porte des bouges d’où s’échappe beuglante la musique des assassins et des poètes ? Et te voilà à leur table, tu ne manques pas de courage, l’un veut te vendre la barbe de Castro, l’autre connaît le secret des étoiles, le troisième possède le plan authentique de l’île au Trésor. Tu dresses l’oreille. Un trésor ? Pourquoi pas, une façon comme une autre de dire chose au destin. Et voilà qu’il te révèle que le trésor est celui que Pauline, la belle, la volage Pauline Bonaparte (la soeur de) a enterré dans l’île de la Tortue. L’endroit est aujourd’hui administré par des prêtres. Peu importe, tu te feras passer pour un archéologue ou quelque chose comme ça. Encore faut-il y arriver, dans cette satanée motte de terre entourée des eaux de la mer des Caraïbes. Ah, c’est pourquoi tu commences ton roman aujourd’hui à Santiago de Cuba, l’ancienne capitale détrônée par La Havane. Je me disais aussi… Bon, il y a la mer. Tu te payes une tempête magnifique – c’est décrit à la perfection – et un naufrage obligé. Mais qui est le mystérieux JMF qui t’a embarqué dans cette histoire ? Et si, au lieu de chatouiller les Esmeralda et les Zana et toutes ces femmes qui tombent pantelantes dans tes bras musculeux, tu faisais un peu attention à son micmac ? Attention ! Tu crois dégotter – tranquille, à l’aise – les picaillons de Pauline, tu risques de te retrouver dans une guerre civile et peut-être pire.
Je vais te faire un aveu : je n’aime pas les livres d’aventures. Mais j’ai dévoré le tien. Je t’ai envié cette façon d’aller à l’action avec un dictionnaire, de te moquer des mots en employant les plus rares et les plus colorés, je t’ai jalousé cette faculté d’enjôler les femmes les plus farouches puis de les coucher sur le papier pour que nous autres, pauvres voyeurs, nous en fassions nos fantasmes. Non, rassure-toi, je ne vais pas raconter le fin mot de l’affaire, il faut que chacun aille payer en ducats d’euro le livre de tes riches heures, peut-être que ce filet d’or, ces royalties si bien nommées, te permettront de filer vers La Barbade ou le rivage des Patagons – il y a encore des trésors à déterrer, des Espagnoles à ravir et des romans d’aventures à nous offrir…

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