L’opposition en chute libre

S’ils ne veulent pas tout perdre, les adversaires du camp présidentiel sont contraints de participer aux législatives, qu’ils menacent de boycotter.

Publié le 11 juin 2007 Lecture : 3 minutes.

Les élections législatives du 24 juin auront bien lieu, comme prévu par le gouvernement de Brazzaville. L’opposition, qui souhaitait la création d’une commission électorale « vraiment indépendante », semble avoir perdu son combat. Ses menaces de boycottage n’auront servi à rien. Et ses récriminations au sujet du décret convoquant les électeurs avant même que les circonscriptions n’aient été déterminées n’auront trouvé aucun écho.

Dans un baroud d’honneur, les partis de l’opposition ont réclamé un report du scrutin. En vain : le pouvoir est resté sourd à leurs revendications. Les espoirs du Front démocratique pour la commission électorale indépendante (FDCEI), qui regroupait notamment l’Union panafricaine pour la démocratie et le progrès social (Upads) de l’ex-président Pascal Lissouba et l’Union pour la démocratie et la République (UDR-Mwinda) de l’ancien Premier ministre André Milongo, se sont effondrés. Même désarroi au sein du collectif réunissant les adversaires du Parti congolais du travail (PCT, au pouvoir), certains de ses alliés de la majorité présidentielle et la société civile. Si elle ne veut pas tout perdre, l’opposition n’a, semble-t-il, d’autre choix que de participer à la consultation dont les conditions ont été imposées par le gouvernement. « Nous étions d’accord sur la tenue d’élections transparentes et consensuelles, mais en désaccord sur la question du boycottage, confie Grégoire Lefouoba, leader du Parti congolais du renouveau (PCR). De toute façon, les oppositions sont plurielles, seul le pouvoir est singulier. Si nous n’allons pas aux élections, il aura beau jeu de nous marginaliser. Entre deux maux, il faut choisir le moindre. » La stratégie qui consistait, comme l’affirme le président de la Convention des républicains (CR), l’avocat Hervé Ambroise Malonga, « à s’adresser au peuple et à attirer l’attention de la communauté internationale pour se faire entendre et ne pas cautionner un processus vicié dès le départ » n’a pas été payante.
Aussi, l’une grandes interrogations de ces législatives reste le taux de participation. Nul ne peut dire aujourd’hui si les électeurs s’aligneront sur la logique du gouvernement, qui garantit que la Commission nationale électorale (Conel) est indépendante, ou sur celle de l’opposition, qui soutient le contraire. Autre facteur qui pourrait peser sur le scrutin : les divergences au sein du parti au pouvoir. Certains membres de son aile conservatrice ont, en effet, décidé de se présenter en indépendants, tandis que ses partenaires de la majorité présidentielle lui reprochent de pas avoir tenu ses promesses. Au final, le PCT pourrait bien rafler la mise et ne laisser que des miettes aux uns et aux autres.

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La déliquescence de l’opposition remonte à 2002, date des dernières législatives. Avec seulement 12 députés (Upads et UDR) sur 137, elle ne pèse pas très lourd sur l’échiquier politique. Sans parler des querelles intestines qui ne cessent de ternir son image. À l’Upads, la guerre de la légitimité se poursuit entre Christophe Moukouéké, ancien secrétaire général destitué par Lissouba, son successeur Paulin Makita, nommé par le même Lissouba à la tête d’un comité provisoire, et Pascal Tatsy Mabiala, élu lors du congrès du parti, à Brazzaville, en décembre 2006. Un congrès qui n’a jamais reconnu Moukouéké ni Makita En dehors de l’Upads, la formation d’André Milongo pourrait être contestée par sa base quelque peu déboussolée par son changement de cap après avoir longtemps prôné le boycottage. Sans moyens financiers pour concurrencer le PCT et sans réel leader charismatique, l’opposition congolaise a du mal à trouver ses marques.

Sa faiblesse tient également, relève un observateur, « à la facilité avec laquelle Denis Sassou Nguesso les cueille les uns après les autres ». En avril, le PCT a débauché un poids lourd en s’alliant avec le Mouvement congolais pour la démocratie et le développement intégral (MCDDI) de Bernard Kolélas, autrefois farouche opposant au régime actuel. L’ancien chef de l’État Joachim Yhombi-Opango, qui vient de bénéficier d’une amnistie présidentielle, est attendu incessamment à Brazzaville après dix ans d’exil. Certains spéculent sur une réconciliation avec Sassou Nguesso dès le mois d’août à l’occasion de la Fête nationale organisée à Owando (nord du Congo). Yhombi-Opango emboîtera-t-il, à son tour, le pas à Kolélas ? En attendant, les députés de l’opposition dans l’actuelle législature devront batailler ferme pour se faire réélire. Leur avenir politique en dépend.

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