Pourquoi le Québec séduit toujours plus d’étudiants africains

Grâce au soutien de ses établissements universitaires, le Québec attire depuis longtemps les étudiants francophones étrangers, dont beaucoup d’Africains. Et en recueille en retour les fruits.

L’Université Laval a enregistré une hausse de 60 % de ses contingents d’étudiants africains depuis 2016. © Université Laval

L’Université Laval a enregistré une hausse de 60 % de ses contingents d’étudiants africains depuis 2016. © Université Laval

OLIVIER-CASLIN_2024

Publié le 15 juin 2021 Lecture : 4 minutes.

Fresque géante, à Montréal, en hommage à Jackie Robinson, premier joueur noir à avoir évolué dans la ligue professionnelle nord-américaine de base-ball, de 1947 à 1956. © Corinne SIMON/CIRIC
Issu du dossier

Québec-Afrique : de la parole aux actes

Annoncée à la mi-2019, la première stratégie africaine de la Belle Province sera présentée dans les mois à venir, notamment lors du prochain sommet de la Francophonie, à Djerba, en Tunisie.

Sommaire

Cela fait bientôt cinquante ans que le Québec ouvre en grand les portes de ses établissements d’enseignement supérieur aux étudiants du monde entier, notamment francophones. Une destination depuis longtemps appréciée des Africains pour l’accessibilité de ses formations de haut niveau. Au point que le secteur fait partie des cinq piliers identifiés par le gouvernement québécois pour asseoir sa « Vision Afrique », qui doit être dévoilée avant la fin de cette année.

Ils sont chaque année plusieurs milliers à franchir l’Atlantique pour suivre des cycles d’études professionnelles, technologiques ou universitaires, avec l’objectif, diplôme en poche, de rentrer participer au développement économique de leur pays ou de solliciter la résidence au Québec pour intégrer en quelques années un marché du travail en pleine effervescence.

la suite après cette publicité

« Pour 2019-2020, nous avons reçu 16 000 demandes de dossiers en provenance de 45 pays d’Afrique pour l’ensemble de nos établissements partenaires », précise Catherine Plasse-Ferland, directrice-adjointe du Pôle régional en enseignements supérieur Capitale-Nationale. Également connu sous le nom de Québec Villes Études, il regroupe depuis 2018 les principales institutions universitaires et d’études supérieures de la province du même nom.

Pénurie de main-d’œuvre

Impulsé par le ministère de l’Éducation québécois, ce regroupement des principaux acteurs de la formation entre dans la stratégie gouvernementale destinée à répondre à la pénurie de main-d’œuvre observée dans de nombreux secteurs économiques de la province, et estimée actuellement à près de 150 000 postes, dont la moitié exigerait un niveau d’étude supérieure.

L’Université Laval a enregistré une hausse de 60 % de ses contingents d’étudiants africains depuis 2016

Une perspective qui suscite un intérêt grandissant ces dernières années chez les bacheliers africains, toujours plus nombreux à venir tenter leur chance au Québec. L’Université Laval, le plus grand établissement francophone d’enseignement supérieur d’Amérique du Nord, particulièrement présent à travers l’Afrique, a enregistré une hausse de 60 % de ses contingents d’étudiants africains depuis 2016.

Même progression dans le réseau des Collèges d’enseignement général et professionnel (Cegep) qui, dans le cursus scolaire québécois, fait le pont entre le lycée et l’université, avec un diplôme équivalent à une première année de licence. Un « animal solitaire » selon Francis Brown Mastropaolo, directeur des affaires internationales de la Fédération des Cegep, « suffisamment agile au niveau des formations proposées pour répondre aussi bien au souhait de spécialisation des doctorants qu’à l’urgence des migrants de s’insérer dans le marché du travail québécois ».

la suite après cette publicité

Avec ses 48 collèges, implantés sur l’ensemble du territoire, le réseau des Cegep constitue la porte d’entrée idéale pour les nouveaux arrivants, qui peuvent construire leur parcours en optant pour un diplôme d’études collégiales (DEC) leur permettant de suivre un cursus de niveau universitaire ou pour une attestation d’études collégiales (AEC), dont les formations plus ou moins longues sont censées correspondre au plus près aux besoins constatés en matière de ressources humaines.

C’est notamment le cas des programmes de formation proposés par le Cegep Limoilou, définis avec le concours des chefs d’entreprise de la région et particulièrement pensés pour le public africain. La formule Cegep séduit sur le continent même, puisque les Québécois ont participé à la réforme de l’Institut supérieur d’enseignement professionnel du Sénégal (Isep), lancée en 2013 par le président Macky Sall. Une première expérience a été menée avec succès à Thiès, dupliquée par la suite dans le reste du pays.

la suite après cette publicité

Cameroun et Mozambique

Les Cegep disposent aujourd’hui d’une cinquantaine d’accords de coopération (numérisation des formations, développement de l’entrepreneuriat, assistance technique…) en Afrique de l’Ouest, ainsi qu’au Cameroun ou au Mozambique. « Notre approche très professionnalisante orientée sur l’employabilité des personnes commence à être largement reconnue sur le continent », constate Francis Brown Mastropaolo.

Au fil des générations, le Québec s’est constitué en Afrique un réseau unique

D’autres grands établissements, tels que l’École nationale d’administration publique (ENAP) et l’Institut national de la recherche scientifique (INRS), constituent également des voies d’accès privilégiées pour les Africains désireux d’étudier outre-Atlantique. Tous deux accueillent plusieurs centaines d’étudiants africains qui, chaque année, représentent entre 20 % et 25 % de leurs contingents étrangers respectifs.

L’ENAP, qui a vu passer sur ses bancs plusieurs milliers d’Africains en près de cinquante ans, propose des doctorats et des maîtrises reconnus dans de nombreux pays francophones du continent. Certains cursus ont même été délocalisés sur place, pendant que des modules de formation continue sont également proposés aux administrations locales.

Au fil des générations, le Québec s’est constitué en Afrique un réseau unique qui se densifie à chaque nouvelle promotion. « Quand les étudiants restent, ils rentrent dans la famille. Quand ils repartent dans leurs pays respectifs, ils sont nos meilleurs amis sur place », constate Francis Brown Mastropaolo. Dans un cas comme dans l’autre, le Québec en sort gagnant. Et les étudiants africains qui ont franchi le pas également.

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

Dans le même dossier

Comment le Québec veut peser en Afrique