Nigeria : le général Olusegun Obasanjo accède au pouvoir

14 février 1976

Publié le 11 février 2008 Lecture : 3 minutes.

Dans la soirée du samedi 14 février 1976, les auditeurs de la radio nationale nigériane entendent la voix du lieutenant-général Olusegun Obasanjo. Le ton du chef d’état-major des armées, un gradé expérimenté qui s’est illustré pendant la guerre du Biafra (1967-1970), est empreint d’une émotion inhabituelle. « Le Nigeria a perdu l’un de ses fils les plus brillants », déplore-t-il, avant d’annoncer, solennel, qu’il a été désigné chef de l’État « contre sa volonté ». Brillant élève des écoles militaires britanniques, réputé habile et modéré, Obasanjo devient, à 39 ans, le premier Yorouba, cette ethnie chrétienne de l’Ouest moins présente dans les cercles du pouvoir que les Ibos (Sud) et les Fulanis (Nord), à accéder à la tête du Nigeria. Pour l’appuyer, un musulman du Nord, le lieutenant-colonel Shehu Yar’Adua, lui succède au poste de chef d’état-major des armées et est nommé général.
La veille, aux aurores, un commando s’est attaqué à la limousine noire du général Murtala Mohammed, chef de l’État et président du Conseil militaire suprême. Avec son aide de camp, il se rendait comme tous les matins au quartier général de Dodan Barracks, sur l’île d’Ikoyi, à Lagos, la capitale d’alors. Contrairement à son prédécesseur, le général Yakubu Gowon, il ne souhaitait pas être encadré par un service de sécurité pléthorique et continuait à vivre dans sa résidence privée. Bien mal lui en a pris. La mort de ce chef charismatique natif de Kano, dans le Nord, plonge le Nigeria dans l’émotion. Sept jours de deuil national sont décrétés.

Pour autant, le coup d’État fomenté par le lieutenant-colonel Bukar Dimka, un officier de Lagos connu pour son goût pour le champagne et les boîtes de nuit, a échoué. Dès midi, le 13 février, des commandements militaires de différents États de la fédération condamnent la tentative de putsch et cette « poignée de soldats » prétendument révolutionnaires, qui ont probablement échafaudé le scénario de leur complot au cours d’une nuit arrosée. Les vingt membres du Conseil militaire suprême, eux, décident que le numéro deux du régime, Olusegun Obasanjo, remplacera Murtala Mohammed.
Lorsqu’il s’exprime sur les ondes, le nouveau chef de l’État annonce qu’il poursuivra la politique de son prédécesseur et respectera sa promesse phare : rendre le pouvoir aux civils en 1979. Durant ses sept mois passés au Palais, Mohammed, qui avait accédé à la tête du pays à la faveur d’un coup d’État sanglant le 29 juillet 1975, s’était donné pour mission d’éradiquer la corruption et de rétablir l’ordre, desseins que l’armée pléthorique et les hommes d’affaires n’appréciaient guère. Pour mettre fin aux différends ethniques, il avait également prévu la construction d’une nouvelle capitale « dans un endroit vierge du pays » : Abuja.
Se revendiquant de la sagesse de son prédécesseur, Obasanjo fera tout pour que les coupables paient. Le 11 mars, l’ancien ministre de la Défense, le général Bisalla, ainsi que vingt-neuf autres conjurés sont exécutés. Le 15 mai, sept autres personnes, dont Dimka, subissent le même sort. Exilé en Grande-Bretagne, le général Gowon est lui aussi soupçonné d’avoir participé au complot. Mais Londres refuse de l’extrader.
Peu à peu, Obasanjo gagnera la confiance de la communauté internationale. Et, comme promis, il organisera une élection présidentielle en 1979, remportée par Shehu Shagari. Un acte de loyauté que les Nigérians n’ont pas oublié : vingt ans plus tard, ils l’élisent à la magistrature suprême.

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