La fièvre caoutchouc

À l’heure où nombre de planteurs cherchent à diversifier leurs activités, la culture de l’hévéa constitue l’un des premiers investissements des exploitations familiales.

Publié le 11 février 2008 Lecture : 2 minutes.

Alors que l’agriculture tente de résister mais pâtit globalement de la crise, l’hévéaculture ne s’est jamais aussi bien portée. La production de caoutchouc sec a dépassé les 200 000 tonnes en 2007, un record. Le long des routes du pays, les « forêts d’hévéas » se font plus nombreuses. Les pépinières s’installent partout, y compris à l’ombre des cacaoyers. À l’heure où tout le monde lorgne le pétrole, les campagnes entament une reconversion de l’agriculture familiale en faveur du caoutchouc.
La culture de l’hévéa remonte au début des années 1970. À l’époque, le président Félix Houphouët-Boigny souhaite diversifier une production agricole trop dépendante du cacao et du café. Le pays se lance alors dans la production industrielle de l’hévéa, mais les récoltes restent modestes. Dès les années 1980 et 1990, les petits planteurs suivent le mouvement mais leur activité est limitée au rythme des projets officiels et freinée par la chute des cours mondiaux en 1999. À partir de 2005, la tendance s’inverse, les cours flambent et la culture retrouve tout son attrait. La libéralisation est passée par là : tout planteur peut se lancer dans l’hévéa. Sentant le bon filon, de nombreux gradés militaires en activité ou retraités investissent leurs revenus dans la filière. Même les responsables des structures de régulation de la filière cacao acquièrent des plantations de 100 ou 200 hectares pour diversifier leurs ressources. Comme il faut cinq à six ans pour que les clones d’hévéas entrent en production, tout le monde s’attend à un boom en 2010. Mieux encore. Amadou Gon Coulibaly, le ministre de l’Agriculture, a annoncé, le 5 janvier, un vaste plan de développement de la filière. Objectif : augmenter la superficie cultivable de 120 000 à 300 000 hectares avec une prévision de récolte de 600 000 tonnes d’ici à 2020.
Une enquête portant sur 1 100 planteurs représentant les exploitations familiales de la zone forestière de Côte d’Ivoire a démontré que l’hévéa constituait leur première source d’investissement. Certains experts estiment qu’en 2008 quelque 50 000 hectares de nouvelles plantations seraient créés « Être planteur d’hévéas, c’est être fonctionnaire », dit-on dans les campagnes. Contrairement au cacao, dont la production et les profits restent concentrés sur une courte période, la plus grande régularité des revenus de l’hévéaculture apparaît comme un atout essentiel dans une Côte d’Ivoire qui se modernise. Alors que l’électrification des villages ivoiriens progresse, l’argent provenant du caoutchouc sec permet de payer les factures mensuelles. Ou de faire face à certaines dépenses saisonnières, comme les frais de scolarité au moment de la rentrée des classes.

* Économiste au Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad).

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