Le patriarche d’Odienné

La classe politique ivoirienne a unanimement pleuré la disparition de cet ancien ministre de l’Économie et des Finances d’Houphouët.

Publié le 10 décembre 2007 Lecture : 2 minutes.

Initialement prévu du 14 au 16 décembre, avant d’être reporté au 2 février prochain, le congrès du Rassemblement des républicains (RDR, de l’ancien Premier ministre Alassane Dramane Ouattara) observera probablement une minute de silence à la mémoire de l’un de ses plus illustres et tout aussi discrets militants : Lamine Diabaté, dont la disparition quelques semaines plus tôt, le 10 novembre, à un peu moins de 81 ans, aura eu raison de la préparation de ces assises réunies dans la perspective des échéances électorales de 2008.
Ce ne sera que le dernier hommage en date que le parti, mais aussi l’ensemble de la classe politique ainsi que la haute administration du pays, a rendu à l’un des siens. Le président Laurent Gbagbo s’est incliné devant sa dépouille, l’a élevé à la dignité de grand-croix de l’ordre du Mérite ivoirien « pour service rendu à la nation » et remis la distinction à sa veuve, Henriette Dagri Diabaté, secrétaire générale du RDR. Qui a reçu, chez elle, les condoléances de l’ex-chef de l’État Henri Konan Bédié.
D’autres, comme l’ancien gouverneur de la Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) Charles Konan Banny, ont tenu à être présents au cimetière abidjanais de Williamsville. Au milieu de membre de la famille, de proches, d’amis, de relations du défunt ou de simples anonymes. Bel élan de solidarité et de reconnaissance qui n’était pas que de circonstance. Loin s’en faut. Le patriarche d’Odienné, dans le nord-ouest du pays, où Lamine Diabaté était venu au monde un jour de janvier 1927, était sinon un faiseur de destin, du moins un faiseur d’hommes. Comme directeur national à Abidjan, il fut notamment l’un des artisans de l’africanisation des cadres de la BCEAO.
Entre autres, Alassane Outtara, alors jeune économiste au Fonds monétaire international, lui en a su gré, qui rappelle que c’est grâce à lui qu’il a fait dès 1972 ses premiers pas au siège parisien de la Banque, avant d’en devenir le gouverneur une vingtaine d’années plus tard. Ainsi était Lamine Diabaté, à la fois grand frère, père et mentor de beaucoup de ses compatriotes. À ceux qui passaient lui rendre visite il aimait aussi raconter, non sans pudeur, son séjour dans la prison d’Assabou, à Yamoussoukro, où Houphouët, avant d’en faire son ministre d’État chargé de l’Économie et des Finances, l’avait jeté pour complot, au début des années 1960. Lui et ses camarades d’infortune, comme Samba Diarra, Ahmadou Koné, Bamba Kodiara Koné ou l’ex-Premier ministre Seydou Elimane Diarra. Il en parlait sans haine ni ressentiment, davantage pour témoigner des séances de torture qui y avaient cours et dont il portait encore les séquelles, que pour se plaindre.
De son passage dans cette pension de sinistre mémoire date son goût pour la liberté, la justice et la tolérance. Trois mots qui auraient pu servir d’épitaphe à Lamine Diabaté.

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