Général Babacar Gaye

Commandant de la force de la Mission de l’Organisation des Nations unies en République démocratique du Congo (Monuc).

Publié le 10 décembre 2007 Lecture : 3 minutes.

Droit dans ses bottes, l’allure athlétique, le général qui nous rend visite en cette froide journée de fin novembre ne passe pas par quatre chemins pour dire sa part de vérité. « Je suis aujourd’hui dans vos locaux pour défendre l’honneur de mes hommes », clame d’emblée Babacar Gaye, commandant de la force de la Mission de l’Organisation des Nations unies en République démocratique du Congo (Monuc). Il n’a pas apprécié qu’un article paru il y a quelques semaines dans Jeune Afrique mette en doute le courage des Casques bleus de la Monuc. Et tient à le faire savoir. « J.A. est le journal de l’Afrique. Je le respecte et suis sensible à ce qu’il dit. Voilà pourquoi je réagis. En provenance de New York, je suis à Paris pour un court séjour, mais j’ai tenu à passer ici pour partager avec vous mon vécu à la tête de la Monuc. »

Ce Sénégalais de 57 ans, marié à une banquière et père de deux enfants en passe de terminer leurs études universitaires en France, conduit depuis mars 2005 le plus grand contingent de maintien de la paix déployé dans le monde : 17 000 hommes de 55 nationalités, 22 avions, 17 hélicoptères, 2 117 véhicules, 3,06 millions de dollars de dépenses journalières, 1,133 milliard de dollars de budget annuel
Particulièrement bien équipée, cette force fait l’objet de nombreuses critiques, accusée d’assister sans réagir aux massacres de civils par des factions armées. Le pire a été évité en 2004, quand les Congolais s’en sont pris aux véhicules de la Monuc, reprochant à ses agents d’être restés inactifs face à la prise de Bukavu (est) par le général félon Laurent Nkunda. « Les gens attendent beaucoup de la Monuc, qui ne peut pas tout faire, explique son commandant. Nous agissons dans un pays aussi vaste que destructuré, qui couve de nombreux foyers de tensions. En Sierra Leone, qui a la taille de la seule province de l’Ituri, située au nord-est de la RDC, il a fallu 15 000 hommes pour stabiliser la situation. » Et le général Gaye d’ajouter, avec ce souci permanent de défendre l’honneur de ses troupes : « Malgré ses effectifs insuffisants, la Monuc a dû plusieurs fois recourir à la force pour freiner ou prévenir des exactions : contre l’ADF-Nalu [les rebelles ougandais du Nord-Kivu, NDLR] en décembre 2005, contre l’offensive de Nkunda sur Goma et Saké au début de 2007 Depuis son arrivée en RDC, en 1999, notre contingent a perdu 29 hommes, morts au combat. Nous n’avons pas peur d’aller au feu. »

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Chargé de diriger les opérations militaires et de veiller au respect du mandat confié par l’ONU à la Monuc (qui inclut le recours à la force pour protéger la population civile), le général met un point d’honneur à corriger certaines dérives. Tels les scandales sexuels dans lesquels étaient impliqués quelques-uns de ses éléments. « Dans cette affaire, précise l’officier supérieur, j’ai reçu des instructions fermes de l’ONU. Et je ne badine pas avec la moralité des troupes. Des mesures strictes sont appliquées à tous nos soldats : couvre-feu à partir de 19 heures, interdiction de toute relation privée avec les Congolaises, rapatriement immédiat de tout homme qui viole cette disposition La Monuc est aujourd’hui l’une des forces les plus disciplinées au monde. »
Le verbe précis de ce militaire de carrière détonne, mais n’étonne pas au vu de son parcours. Babacar Gaye a suivi toute sa formation à l’École d’état-major et à l’École de guerre, en France (il est issu de la promotion De Gaulle – 1970-1972 – de l’École spéciale militaire de Saint-Cyr). Chef d’état-major de l’armée sénégalaise de 2000 à 2003, il refuse de répondre à la moindre question sur la vie politique de son pays. En bon militaire, de surcroît en activité.

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