France-Afrique : dernières nouvelles du front

Publié le 10 décembre 2007 Lecture : 4 minutes.

Fracas des armes aux confins orientaux du Tchad, fragile décrispation en Côte d’Ivoire, statu quo avec le Rwanda, dégel en Angola, franche explication avec le Centrafricain Bozizé L’actualité franco-africaine n’est pas tout à fait, ces temps-ci, un long fleuve tranquille. Voici, recueillies de bonnes sources, quelques-unes des dernières nouvelles du front, telles qu’on les voit depuis Paris.

Tchad. C’est la grosse inquiétude du moment. Les Français ne redoutent pas tant un effondrement militaire de l’armée tchadienne face aux rebelles de l’Est que l’épuisement du clan zaghawa dont sont issus à la fois le président Déby Itno et l’un des chefs rebelles, Timam Erdimi, son neveu. Les combats fratricides de ces dernières semaines ont littéralement saigné à blanc une communauté déjà exsangue. Le risque, vu de Paris, relève donc beaucoup plus d’un coup d’État interne à la « famille » que de la chute de N’Djamena. La France soutient le soldat Déby, mais avec des limites. Pour l’instant, affirme l’un de nos interlocuteurs, l’armée française fournit du renseignement aérien, transporte des blessés et un peu de matériel, mais pas de troupes, même si cette hypothèse n’est pas exclue. Par contre, au cas où une colonne rebelle descendrait sur la capitale, comme en avril 2006, la France n’interviendrait pas, y compris, assure-t-on, par des coups de semonce de Mirage 2000. Qui arme les rebelles ? « Le Soudan, c’est avéré », avance un proche du dossier, « mais aussi, financièrement, la Libye ou tout au moins certains services libyens à qui Kadhafi accorde une marge d’autonomie ». Autre souci français, le déploiement du contingent de l’Eufor, que la situation actuelle retarde, voire compromet. La réponse se veut le moins ambiguë possible : « Le président Sarkozy y tient, certes. Mais de là à imposer cette opération dans un environnement totalement hostile, il y a un pas. Si un acteur majeur comme le Soudan est décidé à la saboter, nous la remballerons, hélas »

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Côte d’Ivoire. Depuis la signature de l’accord de Ouagadougou en mars 2007, la France n’est plus un acteur central du processus de sortie de crise. Mais tout de même, là aussi, le « vu de Paris » compte. Or, vu de l’Élysée, la perception de Laurent Gbagbo a fondamentalement changé depuis l’époque Chirac. Ainsi, l’hypothèse d’une réélection du président ivoirien n’est plus considérée comme inenvisageable : « Peu importe la bouteille si le vin est bon », résume notre interlocuteur, c’est-à-dire si l’élection se tient dans des conditions acceptées par tous. Et de relever « une évolution encourageante du discours officiel qui se traduit notamment par la relative marginalisation des durs, comme Simone Gbagbo et Mamadou Koulibaly, ainsi qu’un élargissement de la base électorale » de l’actuel chef de l’État. Côté français, où l’on se dit persuadé que la présidentielle ne pourra pas se tenir avant octobre 2008 (« juin, c’est impossible, sauf à la bâcler »), la principale préoccupation concerne la solidité de l’attelage formé par le président et son Premier ministre Guillaume Soro. « ça tire à hue et à dia, la rivalité est patente et nous n’avons jamais cru en un quelconque accord secret entre eux », explique notre interlocuteur, qui ajoute : « Nous ne sommes pas sortis de l’équation désarmement contre identification, ou l’inverse. Gbagbo veut reconquérir le Nord, mais Soro ne peut pas reculer sur les listes, car il a des fusils pointés dans son dos. » Allusion à la tentative d’attentat contre le Premier ministre du 29 juin dernier, à propos de laquelle les Français avouent pourtant n’avoir toujours aucun élément permettant d’identifier avec certitude les commanditaires ? Sans doute. Au cur de la problématique : le fameux « stock stratégique » d’environ trois millions d’électeurs potentiels en attente d’identification, puis d’inscription sur les listes électorales actualisées, dont l’allégeance politique est inconnue mais qui pourraient, dit-on, « faire la différence »

Angola. Ici, tout baigne, ou presque. Depuis que le juge d’instruction en charge du dossier Falcone – l’« Angolagate » – a constaté qu’aucun des mis en examen (une quarantaine) qui seront jugés courant 2008 n’avait la nationalité angolaise, l’affaire est devenue, si l’on en croit le secrétaire d’État à la Coopération Jean-Marie Bockel, purement « franco-française ». Le président dos Santos n’en demandait pas plus. Nicolas Sarkozy ira donc à Luanda au début de l’an prochain.

Rwanda. Le bout du tunnel, en l’occurrence le rétablissement des relations diplomatiques avec la France, est encore loin. Il y a peu, des diplomates des deux pays se sont discrètement rencontrés à Kigali pour établir la liste des contentieux historico-judiciaires, ce qui constitue un premier pas. Mais cette liste comporte pas moins de quinze points et autant de feuillets. Deux solutions : soit le geste politique fort de la part de la France que serait une visite de Bernard Kouchner, dont « le principe est à l’étude », dit-on, soit une longue et lente décantation. Aux dernières nouvelles de ce front-là, on s’oriente plutôt, vu de Paris, vers la seconde hypothèse.

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