De Dakar à Constantine
Publié le 10 décembre 2007 Lecture : 1 minute.
Jamais un président français n’était allé aussi loin que Nicolas Sarkozy, lors de son discours de Dakar, dans la réhabilitation du colonialisme et jamais un président français n’était allé aussi loin que le même Nicolas Sarkozy, lors de ses discours d’Alger et de Constantine, dans la condamnation de ce même colonialisme. Entre ces deux pôles, à quatre mois d’intervalle et sous une même plume, celle du conseiller Henri Guaino, une évolution sensible qui est sans nul doute une preuve d’intelligence et de courage politiques. Certes, dans le choix des mots pour le dire, il n’y a eu en Algérie ni excuse ni repentance – une telle démarche revenant pour la France, estime Sarkozy, à une perte d’estime de soi -, mais une vraie reconnaissance que le système colonial, « profondément injuste », fut une « entreprise d’asservissement et d’exploitation ». Les fameux « aspects positifs » de la colonisation, gravés dans une loi jugée scélérate par les ex-colonisés, sont passés à la trappe, et ne subsistent, dans le discours sarkozien, que « la bonne volonté et la bonne foi de beaucoup de colons ». Même si l’on peut, à bon droit, contester le parallélisme des victimes de la guerre auquel s’est livré Nicolas Sarkozy (« innombrables, des deux côtés »), sachant qu’il y eut, au bas mot, cent cinquante fois plus de morts algériens, essentiellement civils, que français, on se doit de constater que le traitement de la mémoire malade du passé colonial de la France a fait, début décembre, quelques progrès.
De Dakar à Constantine, le couple Sarkozy-Guaino a donc démontré qu’il savait écouter les critiques, ce dont on ne peut que se féliciter. Mais il est aussi une autre raison, plus réaliste, à ce changement de ton. En Afrique subsaharienne, le président français annonce des annulations de dettes, alors qu’au Maghreb il engrange les contrats. Difficile de dispenser des leçons quand on veut faire sa cour. Comme quoi, ce sont toujours les rapports de force qui commandent.
