Festival de Cannes : deux films africains en compétition pour la Palme d’or

« Lingui, les liens sacrés » de Mahamat-Saleh Haroun, ancien ministre tchadien de la Culture, et « Haut et fort » du réalisateur marocain Nabil Ayouch font partie des 24 films sélectionnés pour la récompense.

Une scène tirée du film « Haut et fort » de Nabil Ayouch. Virginie Surdej – Amine Messadi

© Virginie Surdej/Amine Messadi

Une scène tirée du film « Haut et fort » de Nabil Ayouch. Virginie Surdej – Amine Messadi © Virginie Surdej/Amine Messadi

Renaud de Rochebrune

Publié le 4 juin 2021 Lecture : 3 minutes.

Le festival de Cannes, annulé en 2020 pour cause de pandémie de Covid-19, aura lieu cette année du 6 au 17 juillet. Une période où l’on peut supposer que la plus grande rencontre cinématographique mondiale pourra se dérouler normalement, ou presque, grâce au recul de la crise sanitaire.

Pierre Lescure et Thierry Frémaux, le président et le délégué général de la manifestation, viennent de dévoiler la sélection officielle. Une sélection qui a d’autant plus de valeur qu’elle résulte du visionnage de presque deux ans de productions et de réalisations (2 300 films). Les tournages ne se sont pas arrêtés malgré l’assaut du virus et beaucoup de films prévus pour être distribués en 2020 ne sont pas encore sortis.

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L’arrivée de deux films africains en compétition pour la Palme d’or — cas inédit depuis longtemps — est donc remarquable. Ils y côtoieront des œuvres d’anciens lauréats comme Nanni Moretti, Jacques Audiard ou Achipatong Weerasethakul et de pointures comme Paul Verhoven ou Sean Penn.

Lingui, la condition des femmes au Tchad

Le Tchadien Mahamat-Saleh Haroun, plusieurs fois primé à Venise (notamment avec le prix spécial du jury pour Daratt, en 2006), a déjà été présent deux fois en compétition à Cannes avec Un Homme qui crie, en 2010 (prix du jury) et Grisgris, en 2016. Et il y a présenté en 2015, lors d’une séance spéciale, un documentaire saisissant sur les rescapés des geôles du dictateur Habré (Hissein Habré, une tragédie tchadienne). On le retrouvera à la tête du ministère tchadien de la Culture entre février 2017 et février 2018, date où, après des désaccords avec le gouvernement, il démissionne brusquement. Il n’avait plus réalisé de film depuis Une Saison en France, en 2017.

Avec Lingui, les liens sacrés, il propose cette année un nouveau long métrage réalisé au Tchad. Il raconte le parcours dramatique de deux femmes, Amina et Maria. La première, mère célibataire rejetée par sa famille et la société, apprend que la seconde, sa fille de 15 ans, a été violée et est tombée enceinte. Une terrible épreuve pour cette musulmane pratiquante, qui a du mal à accepter que son enfant veuille avorter, un acte condamné non seulement par la religion mais aussi par la loi. Un drame que le très rigoureux metteur en scène élève sans doute à la hauteur d’un récit emblématique pour évoquer la condition des femmes au Tchad, et dans toute l’Afrique.

Haut et fort, la jeunesse marocaine défavorisée

C’est à la jeunesse de son pays que s’intéresse de son côté le Marocain Nabil Ayouch dans Haut et fort (anciennement titré Casablanca beats). Il s’agit de sa première participation à la compétition à Cannes, qui représente aussi une première depuis la création du festival pour un film marocain.

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Il est déjà venu à plusieurs occasions sur la Croisette – pour Les chevaux de Dieu et Much loved, deux films qui avaient suscité de très vifs débats – mais dans des sections moins prestigieuses (Un certain regard et Quinzaine des réalisateurs). Le film qui concourra pour la Palme d’or peut être résumé ainsi selon son auteur : « C’est l’histoire d’un ancien rappeur qui arrive dans un centre culturel du bidonville de Sidi Moumen et trouve une bande de jeunes filles et garçons à qui il transmettra sa passion pour le hip-hop ». Une nouvelle manifestation de l’intérêt tout particulier que porte Nabil Ayouch, auteur en 2000 de l’immense succès Ali Zaoua, Prince de la rue, aux jeunes défavorisés. Haut et fort, assure-t-il, n’est d’ailleurs pas sans rapport avec ce qu’il a vécu dans sa propre enfance.

Le Moyen-Orient bien représenté

En attendant les choix des manifestations parallèles (Semaine de la critique et Quinzaine des réalisateurs) qui seront dévoilés dans quelques jours et corrigeront peut-être le tir, on peut noter qu’en dehors de ces deux films, aucun long métrage africain n’a été retenu dans la sélection officielle de Cannes, que ce soit pour Un Certain regard ou les autres sections (films hors compétition, séances spéciales, Cannes premières).

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Le Moyen-Orient, en revanche, sera plutôt bien représenté sur la Croisette avec des films en provenance d’Iran (Un héros, d’Asghar Faradhi), de Turquie (Commitment Hasan, de Hasan Semih Kaplanoglu) ou d’Israël (Le Genou d’Ahed, de Nadiv Lapid et Il y eut un matin, de Eran Kourin). On peut noter aussi, parmi les sélectionnés qui attisent la curiosité, la présence d’un film d’Haïti (Freda de Gessica Généus) ainsi que celle du deuxième film de Hafsia Herzi (Bonne Mère).

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