Elles ont refusé l’excision

Comment de jeunes Est-Africaines sont parties en guerre contre les mutilations génitales.

Publié le 7 novembre 2003 Lecture : 2 minutes.

Un couple éthiopien et deux jeunes Kényanes ont secoué une tradition séculaire en refusant la mutilation génitale féminine. Lors de son mariage l’an passé à Kembatta, en Éthiopie, Genet Girma a brandi le message suivant : « Je ne suis pas excisée, prenez exemple sur moi. » Son époux, Addisie Abosie, affichait aussi sa pancarte : « Je suis très heureux de me marier avec une femme non excisée. » Genet venait de rompre avec un rite de passage qui soumettait les filles de cette région de l’Éthiopie à l’ablation du clitoris et des lèvres inférieures et supérieures.
Genet s’est enfuie de chez elle. La famille et la belle-famille ont renié les deux fiancés. Ce qui ne les a pas empêchés de se marier publiquement. Environ deux mille personnes ont assisté à la cérémonie, largement commentée par les médias éthiopiens.
Edna et Béatrice Kandie, deux soeurs kényanes, peuvent se targuer non seulement de s’être sauvées elles-mêmes, d’avoir protégé de l’excision leurs quatre soeurs cadettes et beaucoup d’autres filles, mais, surtout, d’avoir fait changer la législation dans leur pays. Après s’être enfuies de chez elles, les deux soeurs ont pris langue avec un juriste et défenseur des droits de l’homme, Ken Wafula, qui a obtenu de la justice une décision interdisant au père de faire subir la mutilation à ses filles contre leur gré.
Ce précédent a conduit le Kenya à adopter une nouvelle législation qui criminalise la mutilation génitale féminine. Genet, Addisie, Edna et Béatrice, qui ont été invités aux États-Unis par l’association de défense des droits des femmes Equality Now, sont à l’avant-garde d’un mouvement naissant en Afrique subsaharienne et dont le but est de faire disparaître une pratique rarement remise en question.
Elle n’est particulière ni à une religion ni à une classe sociale. Elle est plus vieille que le christianisme et l’islam. Pas plus loin que dans les années 1950, l’ablation partielle ou totale du clitoris était prescrite en Europe occidentale et aux États-Unis comme un remède à l’hystérie, à l’épilepsie, aux maladies mentales, à la masturbation, à la nymphomanie et au lesbianisme. Aujourd’hui, des filles et des jeunes femmes sont encore soumises à l’excision dans au moins vingt-huit pays africains. Certains immigrants emportent avec eux cette pratique en s’installant dans les pays occidentaux. Au nombre des multiples raisons avancées : le contrôle de la sexualité des femmes et l’initiation à la féminité. Pour les médecins, la mutilation génitale entraîne un traumatisme psychologique durable, une douleur extrême, des infections chroniques, des hémorragies, des tumeurs, des infections urinaires, et présente un risque de stérilité.
La communauté internationale doit s’exprimer au nom des filles et des jeunes femmes et exiger des gouvernements la criminalisation de l’excision et le lancement de programmes éducatifs pour la combattre.
© The New York Times et J.A./l’intelligent 2003. Tous droits réservés.

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