La Logan passe à l’Ouest

Destinée à l’origine aux marchés émergents, la voiture pas chère est de plus en plus demandée en Europe occidentale.

Publié le 10 octobre 2005 Lecture : 3 minutes.

Une bizarrerie s’était cachée dans un recoin du salon automobile de Francfort (12-25 septembre) : l’étonnante version haut de gamme de la Dacia Logan, berline au prix très accessible, exposée dans le but de montrer que « le prix d’une Logan peut facilement se voir multiplié par deux », selon les ingénieurs chargés du projet.
Pour Renault, qui possède la marque roumaine, cette version est un hommage au succès que le modèle remporte non seulement dans les pays de l’Est et les pays en développement, mais aussi sur les marchés plus profitables de l’Europe de l’Ouest.
Avec ses formes anguleuses, la Logan n’a pas l’air luxueuse, mais elle offre une habitabilité supérieure à celle de n’importe quel autre véhicule comparable, à tel point qu’il faut attendre trois mois avant d’être livré sur le marché français.
Luc-Alexandre Ménard, directeur des opérations internationales de Renault, estime que la voiture à 7 500 euros, qui attire des clients français, espagnols et allemands, est devenue « le symbole d’une nouvelle façon d’acheter ». Dans l’Hexagone, depuis sa mise sur le marché en juin, les commandes ont dépassé 9 000 unités malgré l’absence de publicité, alors que les livraisons sur les trois marchés européens n’ont pas dépassé 4 500 voitures. Les ventes mondiales devraient atteindre 150 000 à 160 000 exemplaires cette année, bien au-delà de la cible initiale de 100 000, et les objectifs à long terme sont passés de 500 000 à 700 000 unités. En Roumanie, la Logan rencontre également un succès qui dépasse les espérances. Du coup, son prix a été revu à la hausse, et le modèle d’entrée de gamme à 5 000 euros, qui devait être le plus vendu, n’est toujours pas commercialisé. Résultat : les profits sont largement au-dessus des prévisions, si bien que d’autres versions vont voir le jour. Un break sera lancé l’an prochain, et Renault étudie la possibilité de fabriquer un pick-up et un modèle 5 portes.
Positionnée comme une voiture pas chère destinée aux marchés émergents, la Logan a été conçue dans une optique de réduction des coûts, avec une carrosserie dépourvue de courbes et de formes complexes et la réutilisation de pièces de modèles existants.
Selon Luc-Alexandre Ménard, ce modèle était initialement supposé couvrir les coûts d’investissement, avec un équilibre financier situé au niveau de la valeur en capital. Mais l’engouement sur les marchés d’Europe de l’Ouest et le succès inattendu de la finition haut de gamme (climatisation et lève-vitres électriques ) sur les marchés de l’Est ont conduit Renault à réviser les objectifs de profits à la hausse. « Le projet est d’ores et déjà profitable », déclare Luc-Alexandre Ménard, qui espère désormais que ce modèle va atteindre la moyenne des autres modèles Renault, un taux de marge opérationnel au-dessus de 4 %. Vu le prix de la Logan, ce n’est pas ce qui va transformer les finances du groupe. Mais 100 ou 200 millions d’euros de plus aideront Carlos Ghosn, le président, à améliorer la rentabilité du fabricant français. L’an dernier, les profits de Renault ont atteint 2,1 milliards d’euros, avant contribution à l’alliance avec Nissan.
Le succès de la voiture de Dacia se révèle toutefois problématique pour l’usine roumaine, qui peine à produire suffisamment de voitures et de kits pour les usines d’assemblage situées au Maroc, en Colombie, en Russie et en Inde. Une étude est en cours pour déterminer s’il faut agrandir l’usine existante, ce qui pourrait représenter un investissement de 100 millions d’euros si l’unité de peinture est remplacée, voire un peu moins si l’on rénove simplement l’existant.
C’est un problème plutôt « agréable » pour Carlos Ghosn, qui doit annoncer, en février prochain, le premier plan triennal de Renault, avec des objectifs de profits probablement élevés.
Mais la Logan pourrait aussi se transformer en un investissement controversé, avec la nouvelle usine construite en Iran, en coentreprise avec Saipa et Iran Khodro, qui produira 300 000 unités par an à partir de décembre. Carlos Ghosn ne croit pas que la question nucléaire, qui empoisonne les relations entre l’Europe et l’Iran, puisse conduire à des pénalités économiques ou à des sanctions contre Téhéran. Reste le risque bien réel que ce désaccord hypothèque les espoirs que nourrit Renault d’utiliser l’Iran comme base d’exportation pour toute la région, ce qui allégerait la pression sur l’usine de Roumanie.

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