Gbagbo sauvé ?
Redoutée par les uns, attendue avec espoir par les autres, la réunion du Conseil de paix et de sécurité (CSP) de l’Union africaine (UA) au niveau des chefs d’État et de gouvernement, le 6 octobre, à Addis-Abeba, n’a finalement pas créé la surprise. Son communiqué final n’offre qu’une synthèse des accords antérieurs sur la résolution de la crise ivoirienne, tout en conservant l’essentiel des recommandations du sommet extraordinaire de la Cedeao du 30 septembre, à Abuja. Mais c’est peut-être mieux que rien, car on a frôlé la catastrophe. Le président en exercice, Olusegun Obasanjo, et le médiateur de l’UA en Côte d’Ivoire, Thabo Mbeki, sont arrivés à Addis avec des lectures totalement divergentes des conclusions d’Abuja. Alpha Oumar Konaré, le président de la Commission, a dû déployer des trésors de diplomatie pour les faire asseoir à la même table, vers 15 heures, soit cinq heures après l’heure prévue.
Le soir, un communiqué finissait par statuer d’abord que « les arrangements convenus dans l’accord de Linas-Marcoussis se poursuivront à partir du 31 octobre pour une période n’excédant pas douze mois ». Voilà qui clôt, pour le moment, le débat sur la légitimité de Laurent Gbagbo après la fin de son mandat : l’UA décrète qu’il « demeure chef de l’État au cours de la période mentionnée ci-dessus ». Ensuite, pour tenter, une énième fois, d’organiser des élections libres, « un nouveau Premier ministre acceptable sera nommé ». Il disposera de larges pouvoirs et les membres de son gouvernement seront responsables devant lui, et lui seul.
Bref, rien que les Ivoiriens n’aient déjà entendu. Certes, il fallait renouveler les fonctions et la place du Premier ministre, Seydou Elimane Diarra, définies à Marcoussis, ou de son éventuel successeur. Mais Gbagbo trouvera-t-il un homme de consensus dans un pays qui n’a jamais été aussi divisé ? Si on le lui demandait, Diarra, qui, dans le passé, a déjà menacé de rendre son tablier, acceptera-t-il de rester en place après trois ans de frustrations et d’impuissance ? Il faudrait, pour cela, que le transfert des pouvoirs réitéré aujourd’hui soit réel, comme le suggérait déjà, dans J.A.I. n° 2330, Albert Tévoédjrè, ex-représentant spécial de Kofi Annan en Côte d’Ivoire.
À cet effet, le CPS a décidé de mettre en place un « groupe international de travail » (GIT). Le Nigeria le présidera, tandis que l’Afrique du Sud dirigera le groupe de médiation quotidienne. Un compromis qui permet à Mbeki de garder la tête haute après les critiques formulées à son égard par les Forces nouvelles (ex-rébellion), l’opposition et certains pays de la sous-région. Il se rendra aussi à Abidjan avec son homologue nigérian, avant de présenter les conclusions d’Addis au Conseil de sécurité appelé à se réunir le 13 octobre. Car ce sont bien les menaces de sanctions individuelles brandies par l’organe exécutif de l’ONU qui donnent un tant soit peu de poids aux conclusions du sommet d’Addis. Si l’accord de Marcoussis avait été accompagné de telles mesures de rétorsion, ces réunions à répétition n’auraient peut-être pas eu lieu. Celle d’Addis sera-t-elle réellement la dernière avant la paix ?
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