[Chronique] Orange en RCA : le pré carré français déconnecté ?
L’incendie qui a endommagé les services de l’opérateur Orange en Centrafrique souligne-t-il la perte de vitesse de la France en RCA ?
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Damien Glez
Dessinateur et éditorialiste franco-burkinabè.
Publié le 12 juin 2021 Lecture : 2 minutes.
Les Africains souffrent déjà régulièrement d’interruptions de leur accès à Internet en raison de décisions politiques – lors de périodes électorales ou d’une brouille entre un chef d’État et un réseau social. Mais aussi à cause de rationnements électriques qui sont censés régénérer les batteries des téléphones. Ces derniers jours, ils doivent également compter avec les impondérables des opérateurs téléphoniques. À la suite d’un incendie chez l’opérateur Orange, dimanche 6 juin 2021, un « Africain du Centre » sur cinq s’est retrouvé sans réseau mobile ni Internet…
Incendie accidentel
D’origine accidentelle, le sinistre a ravagé une partie du siège de l’opérateur français à Bangui, provoquant de graves dommages dans les locaux techniques. Régis Delière, directeur général d’Orange Centrafrique, a confirmé mercredi 9 juin que la totalité de ses 800 000 abonnés avaient été touchés par cette panne colossale. Il a certifié que la compagnie étudiait « les différents scénarios de relance des services », le plus tôt possible sans annoncer une date précise.
Les ressortissants de l’avant-dernier pays du monde (188 sur 189) dans le classement du Programme des Nations unies pour le développement (Pnud) ne se sont pas fait prier pour se ruer sur les cartes SIM des concurrents Telecel et Moov. Est-il anodin que cette nouvelle galère renvoie à une société française ?
Censément indépendante de la situation politico-militaire centrafricaine, cette défaillance du service d’Orange pourrait apparaître comme un coup de grâce de l’image de la France à Bangui. Si la RCA est en proie, depuis 2013, à une guerre civile justifiant une collaboration avec l’ancien colon d’Oubangui-Chari, l’armée du président Faustin Archange Touadéra n’entend pas céder à la France les mérites de la récente reconquête d’une partie de son territoire. Ce désamour entre les deux pays est à observer sous le prisme du partenariat avec les Russes.
Le Russie dans la bataille
Sous les arcanes du régime centrafricain, beaucoup pensent que les centaines de paramilitaires « libérateurs » dépêchés par Moscou sont bien plus efficaces que les militaires venus de Paris. Et la Russie d’assurer opportunément la sécurité du président Touadéra et d’intervenir parallèlement via la compagnie de mercenaires Wagner. De quoi faire de la Centrafrique un laboratoire sur le continent avec, en filigrane, un agenda politico-économique.
Le ministère français des Armées annonçait, lundi 7 juin 2021, le gel de son aide budgétaire à la Centrafrique
Conséquence du bras de fer, par procuration, entre Paris et Moscou : le ministère français des Armées annonçait, lundi 7 juin 2021, le gel de son aide budgétaire à la Centrafrique et la suspension de sa coopération militaire avec cet État jugé « complice » d’une campagne antifrançaise de « désinformation massive » présumée téléguidée par la Russie. Le cas emblématique de la RCA semble annoncer d’autres « désirs de Russie » dans l’ancienne zone d’influence francophone, notamment depuis le sommet russo-africain de Sotchi, en 2019. Moscou séduit des sommités maliennes, congolaises, guinéennes, mauritaniennes ou burkinabè.
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