Ben Bella président

Publié le 10 septembre 2007 Lecture : 3 minutes.

En ce dimanche 15 septembre 1963, Ahmed Ben Bella (47 ans) touche enfin au but : il vient d’être élu président de la République algérienne démocratique et populaire. Une semaine auparavant, la Constitution a été adoptée par référendum (5,8 millions de voix pour, 22 515 contre). Le 10 septembre, il a été désigné à l’unanimité de ses pairs comme candidat unique du Front de libération nationale (FLN). Dès le 18, il forme un gouvernement dans lequel Houari Boumedienne est ministre de la Défense, et Abdelaziz Bouteflika chef de la diplomatie. Que de chemin parcouru pour ce fils de modestes fermiers de la région de Maghnia, près de la frontière marocaine !

Sous-officier de l’armée française pendant la Seconde Guerre mondiale, Ben Bella fut l’un des fondateurs du FLN. L’un de ceux qui, le 1er novembre 1954, appelèrent au déclenchement de la lutte armée contre le colonisateur français. Arrêté le 22 octobre 1956 avec cinq autres dirigeants (Mohamed Boudiaf, Hocine Aït Ahmed, Mohamed Khider, Rabah Bitat et Mostefa Lacheraf), il est détenu en France et ne sera libéré qu’au lendemain du cessez-le-feu de mars 1962. Pendant sa captivité, il n’a jamais fait mystère de son ambition de diriger un jour le pays.
En juillet 1962, alors que le peuple prend possession de la rue pour fêter l’indépendance après sept ans d’une guerre atroce, les dirigeants de la révolution s’entredéchirent. En désaccord avec le Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA), Ben Bella quitte Alger et s’installe à Tlemcen. Avec le soutien du chef de l’état-major de l’armée, le colonel Houari Boumedienne, il crée le bureau politique du FLN, prélude à sa conquête du pouvoir. Celle-ci commence véritablement le 3 août.

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Ce jour-là, Ben Bella débarque à Alger en provenance d’Oran. Après avoir sillonné triomphalement les grandes artères de la capitale, il se rend au siège de la télévision, où, entouré de responsables du FLN, il prononce une allocution. « L’union du peuple et de ses dirigeants constitue le meilleur garant pour la réalisation des objectifs historiques que nous nous sommes assignés », déclare-t-il, avant d’appeler à « la construction d’un État démocratique où règnent la fraternité et la prospérité ». La réalité est beaucoup plus sombre.
Dans tout le pays, de sanglants affrontements – 1 500 morts au total – opposent les maquisards « de l’intérieur » aux hommes de l’armée des frontières. Les seconds l’emportent et le 9 septembre, font leur entrée à Alger. À leur tête, Boumedienne et Ben Bella. Le message est clair : les militaires soutiennent désormais ce dernier dans sa marche vers le pouvoir. Les événements s’accélèrent. Le 20 septembre, les Algériens élisent une Assemblée constituante. Neuf jours plus tard, Ben Bella est nommé président du Conseil des ministres.
Las, loin de réaliser l’unité promise, il cède vite aux délices du pouvoir personnel et s’isole dangereusement. Un à un, ses alliés le lâchent. Ferhat Abbas, le président de l’Assemblée constituante, prend ses distances, Boudiaf claque la porte du FLN pour créer le Parti de la révolution socialiste (PRS) – ce qui lui vaudra quelques mois de prison -, Khider démissionne du secrétariat général (en avril 1963) et Aït Ahmed crée le Front des forces socialistes (FFS), avant de déclencher une insurrection en Kabylie.
Le 28 août 1963, ce que tous les adversaires de Ben Bella redoutaient arrive : le système du parti unique est institué. Le 3 septembre, pour tenter de faire contrepoids à l’armée, des « milices populaires » sont créées. Plus tard, interrogé sur ce choix du parti unique, il aura cette réponse abrupte : « La démocratie est un luxe que l’Algérie ne peut encore s’offrir. » Le 19 juin 1965, il sera renversé par Boumedienne, emprisonné, puis assigné à résidence jusqu’en 1980.

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