Éthiopie : trois employés de MSF tués dans une attaque au Tigré
Trois employés de Médecins sans Frontières (MSF), une Espagnole et deux Éthiopiens, ont été tués dans une attaque dans la région éthiopienne du Tigré, a annoncé vendredi la branche espagnole de MSF.
Ces derniers jours, le Tigré a été le théâtre d’un regain d’activité militaire, et une frappe aérienne y a visé mardi un marché, faisant au moins 64 morts.
« Nous avons perdu le contact avec eux et la voiture dans laquelle ils voyageaient hier dans l’après-midi, et ce matin le véhicule a été retrouvé vide et leurs corps sans vie à quelques mètres », a indiqué MSF dans un communiqué en dénonçant « un assassinat brutal ».
María Hernández, de nationalité espagnole et âgée de 35 ans, était l’une des coordinatrices d’urgence de MSF au Tigré. Yohannes Halefom Reda et Tedros Gebremariam Gebremichael, tous deux Éthiopiens et âgés de 31 ans, étaient assistant de coordination et chauffeur pour l’ONG.
« María, Yohannes et Tedros étaient là-bas pour aider la population et il est impensable qu’ils aient payé de leurs vies pour cela », a poursuivi l’ONG.
Enquête
Le secrétaire général adjoint par intérim de l’ONU pour les Affaires humanitaires, Ramesh Rajasingham, a qualifié ces meurtres de « scandaleux et désolants ».
« Les autorités doivent désormais enquêter rapidement » sur ces meurtres qui sont des « violations graves du droit international humanitaire », a-t-il ajouté dans un communiqué à New York.
À Bruxelles, le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell a « condamné de la manière la plus forte » cette « atrocité » qui est « un nouvel exemple horrible de l’escalade du conflit au Tigré et une violation flagrante des lois humanitaires internationales », selon un communiqué.
De leur côté les États-Unis, se disant « consternés et profondément attristés » par les homicides des employés de MSF, ont demandé une enquête indépendante permettant de traduire en justice les auteurs de l’attaque.
« Au final les autorités éthiopiennes ont l’entière responsabilité d’assurer la sécurité des travailleurs humanitaires ainsi qu’un accès libre et sans entraves à l’aide humanitaire », a souligné le porte-parole du département d’État dans un communiqué.
Le ministère éthiopien des Affaires étrangères a affirmé vendredi soir sur Twitter que les trois humanitaires sont décédés dans la localité de Abi Adi, à une cinquantaine de kilomètres à l’ouest de la capitale régionale Mekele.
Il ajoute que « le TPLF (Front de libération du peuple du Tigré) opère activement » dans cette zone.
Exactions
L’armée fédérale éthiopienne a lancé en novembre une opération militaire visant à renverser les autorités locales dissidentes et issues du TPLF.
Ce conflit, qu’Addis Abeba voulait bref, se poursuit, marqué par de nombreux récits d’exactions sur les civils (massacres, viols, déplacements de population…). Des troupes venues de l’Érythrée voisine pour combattre aux côtés de l’armée éthiopienne, et toujours présentes, sont soupçonnées de nombreuses atrocités.
Ces derniers jours, habitants, responsables locaux et diplomates ont relaté à l’AFP un regain d’activité militaire, notamment autour des villes stratégiques d’Adigrat et Wukro.
Mardi, au moins 64 personnes ont été tuées et 180 autres blessées dans une frappe aérienne menée par l’armée éthiopienne sur le marché de Togoga, une localité située entre Abi Adi et Mekele.
L’armée a affirmé que cette « opération », menée au lendemain d’élections législatives et régionales, visait des combattants rebelles.
Le bombardement a été condamné mercredi par l’ONU, qui a demandé une « enquête rapide sur cette attaque et les actes ultérieurs privant les victimes de soins médicaux », ainsi que par l’Union européenne et les Etats-Unis.
Vendredi soir, Tedros Adhanom Ghebreyesus, le patron éthiopien de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), originaire du Tigré, a dénoncé l’attaque, accusant les autorités d’avoir « tué et blessé des civils ».
« Les attaques contre des civils, où que ce soit, sont totalement inacceptables, tout comme empêcher l’accès à des soins immédiats, parce que nous perdons des vies », a déclaré le Dr Tedros, lors d’un point presse à Genève.
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