Schröder businessman

Publié le 10 avril 2006 Lecture : 2 minutes.

Depuis que, le 22 novembre 2005, il a abandonné la chancellerie à la chrétienne-démocrate Angela Merkel, Gerhard Schröder (61 ans) se préoccupe activement de son avenir professionnel. Mais est-ce vraiment « depuis » ? Ou bien un peu avant ? La précision n’est pas sans importance
Le 8 septembre, soit dix jours avant les élections qui allaient mettre fin à sa carrière politique, le futur ex-chancelier signe avec Vladimir Poutine un accord sur la construction d’un gazoduc de 3 000 km – dont 1 200 km sous la mer Baltique – qui permet à la Russie d’approvisionner l’Allemagne en contournant la Pologne et les pays baltes – qui s’estiment trahis -, mais aussi l’Ukraine, avec laquelle les relations ne vont pas tarder à se détériorer sérieusement. Ce projet, d’un coût estimé à 4 milliards d’euros, réunit le géant russe Gazprom (51 %) et, à égalité, les allemandes E.ON et BASF. Le 9 décembre, le consortium pressent Schröder pour le poste de président du conseil de surveillance, qui lui sera officiellement confié le 30 avril prochain. Montant de son salaire annuel : 250 000 euros.
La concomitance de ces échéances politiques et gazières suscite évidemment un certain émoi à Berlin. Libérés des contraintes de la solidarité gouvernementale, les Verts se déchaînent, tandis que les sociaux-démocrates n’hésitent pas à se démarquer sèchement de leur ancien chef : « Je ne l’aurais pas fait », lance Peter Struck, chef du groupe parlementaire SPD et ancien ministre de la Défense. Les chrétiens-démocrates, qui ne peuvent se permettre de mettre en danger la grande coalition qu’ils dirigent, s’abstiennent de commentaires par trop désobligeants, mais Guido Westerwelle, le chef de file des libéraux du FDP, juge « problématique qu’un chancelier accorde un marché à une société et prenne des fonctions de direction au sein de cette même société quelques semaines après son départ du pouvoir ». Les médias dans leur ensemble condamnent ce qui apparaît à tout le moins comme un manque de tact politique.
Toujours aussi pugnace, Schröder se défend bec et ongles. Le 3 avril, il a gagné un procès en diffamation contre Westerwelle, mais le malaise subsiste. Deux jours auparavant, on avait en effet découvert que, fin octobre 2005, l’État fédéral avait accepté de garantir contre le risque politique et économique un prêt de 1 milliard d’euros consenti au consortium par deux banques allemandes. Schröder jure ne pas avoir été informé de ce prêt que Gazprom, grand seigneur, a de toute façon refusé.
Le consortium installera son siège social dans le canton de Zug, le paradis fiscal helvétique, ce qui n’est pas forcément une garantie de transparence. Son grand patron sera Mathias Warnig, ancien de la Stasi, la police politique de l’ex-RDA, et vieille connaissance de Poutine, qui a fait à Berlin ses premières armes de KGBiste.
Décidément insatiable, Schröder travaille parallèlement comme conseiller de la banque Rothschild, du groupe de presse suisse Ringler et du groupe charbonnier allemand RAG, sans compter des interventions à 100 000 ou 200 000 euros dans divers conclaves, séminaires et symposiums. On l’aura compris : l’ex-chancelier social-démocrate s’accommode finalement assez bien de cette économie mondialisée dont il dénonçait naguère les dérives.

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