Le voyage de toute une vie

Une centaine de personnes ont pu séjourner sur leur archipel natal, transformé en base militaire américaine depuis le milieu des années 1960.

Publié le 10 avril 2006 Lecture : 2 minutes.

Huit jours de voyage et trois jours au pays natal après quelque trente années d’exil. C’est la bien maigre consolation que quelques Chagossiens triés sur le volet viennent d’obtenir des autorités britanniques et mauriciennes. Si le retour est bref, il n’en est pas moins historique : pour Eileen, Pierre, Axelle comme pour la plupart des 101 passagers du ferry Trochetia Mauritius, qui quitte Port-Louis le 30 mars, ce pèlerinage est le premier.
Jusqu’en 1967, les Chagos, petit archipel de 65 îlots posé en plein océan Indien, à 1 500 kilomètres au large de Maurice, est une terre paisible, répertoriée sur les cartes de géographie depuis 1815 seulement, année de son passage sous la tutelle du Royaume-Uni. Pendant cent cinquante ans, l’autorité coloniale ne perturbe pas outre mesure la vie des 2 000 habitants. Mais tout change à la fin des années 1960 quand les Britanniques, mis sous pression, acceptent de louer Diego Garcia, l’atoll principal, aux Américains. Situé entre l’Afrique, le Moyen-Orient et l’Asie du Sud-Est, il constitue une base arrière idéale pour l’Oncle Sam en ces temps de guerre froide. Un bail courant jusqu’en 2016 et renouvelable pour une durée de vingt ans est signé. Prétextant le secret des activités militaires, le Royaume-Uni expulse alors tous les habitants à Maurice, indépendante depuis 1968 et à laquelle les Chagos étaient rattachées jusqu’en 1965.
Chassés précipitamment et parfois violemment, déracinés, affublés d’une nationalité britannique dont ils ne sont pas satisfaits, une poignée d’entre eux décident de se faire entendre à la fin des années 1990. Le Groupe réfugiés Chagos (GRC) fait tout pour mettre un terme à l’occupation néocoloniale. Il demande réparation aux États-Unis, utilise la tribune des Nations unies et saisit la justice britannique. Résultat : en 2000, la Haute Cour de Londres ordonne le retour des autochtones. Mais quatre ans plus tard, la décision est annulée. Seuls les détenteurs d’une autorisation peuvent accéder à l’archipel.
Tout n’est pas perdu cependant : le GRC attend le dénouement de deux procédures juridiques, l’une en Grande-Bretagne, l’autre aux États-Unis. Pendant ce temps, Maurice continue de réclamer son ancien archipel au Royaume-Uni et les Chagossiens de se souvenir.

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